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Après cette explication du Fukan-Zazen-Gi, j'aimerais ajouter un peu de connaissances concrètes sur zazen.
(1) Si on ne pratique pas zazen tous les jours, cette pratique est inutile
Zazen est une pratique pour réaliser l'équilibre du système nerveux autonome. Comme il s'agit d'un état momentané, si pour une raison quelconque nous avons perdu cet équilibre dans notre vie quotidienne, il nous faut pratiquer zazen aussitôt que possible afin de recouvrer immédiatement cet état. C'est pourquoi maître Dôgen recommandait aussi de pratiquer zazen quatre fois par jour, régulièrement.
Cependant, il y a de nombreuses différences
entre les sociétés humaines, et ce depuis l'époque de maître Dôgen. Il
nous faut donc choisir le style de vie qui convienne à notre pratique
quotidienne de Zazen. De nos jours, la plupart d'entre nous vivons dans
des sociétés capitalistes modernes, et il nous faut donc avoir un revenu
régulier. Si nous voulons donc poursuivre quotidiennement notre pratique
de Zazen, nous devons trouver le moment approprié, qui corresponde aussi à
notre mode de vie et nous permette d'avoir des revenus suffisants. Dans
mon cas, je pratique Zazen le matin pendant 30 minutes, et le soir aussi
30 minutes, depuis que je me suis retiré du dôjô d'Ichikawa. Je recommande
donc à tous les gens du monde entier de pratiquer Zazen tous les jours
selon leurs propres possibilités horaires.
(2) Malentendu sur "Satori," ou
"Illumination"
Il est vrai qu'il existe quelque chose qu'on appelle "Satori," ou "éveil"
dans le Bouddhisme, mais il y a de nombreux malentendus sur ce concept
d'illumination dans le Bouddhisme.
Par exemple, certains insistent sur le fait que la pratique diligente de
Zazen entraîne une soudaine modification de nos conditions mentale et
physique, accompagnée de la manifestation d'un état splendide et
miraculeux. Mais il est très important de remarquer que ces sortes de
manifestations splendides et miraculeuses n'ont jamais lieu. Ces histoires
procèdent d'une apparition exagérée ou d'une prétention fantastique. Car
nous ne vivons que dans le monde réel, et il est impossible
d'assister à de tels faits miraculeux dans ce monde réel. Si nous
adhérions à une philosophie idéaliste, nous pourrions imaginer la
possibilité d'histoires aussi fantastiques. Mais nous, bouddhistes, qui ne
sommes que des réalistes, ne devrions jamais croire dans des histoires
aussi idéalistes.
En même temps, il y a une autre histoire, qui est également en rapport
avec cette prétendue illumination. certains pratiquants bouddhistes
insistent sur l'idée qu'en pratiquant Zazen de façon intensive et
considérable, on peut arriver à des états physiques très étranges,
inhabituels et fantastiques. Si on suit des horaires malsains et qu'on
pratique Zazen dans ces conditions malsaines, il est vrai qu'on peut
rencontrer de nombreuses sortes de désordes physiologiques, et tomber dans
la confusion, ce qui nous fait perdre d'un seul coup notre état sain et
stable. Il faut donc réfléchir en accord avec ce qui est vrai, qui est
qu'il nous faut rester toujours en bonne santé.
Il y a donc beaucoup de confusion dans le
Bouddhisme, qui provient de ce malentendu sur l'illumination. Dans le cas
de maître Dôgen, lorsqu'il était au Japon avant de partir pour la Chine,
il souffrait de ce même malentendu. A l'époque, il pratiquait Zazen très
diligemment afin d'obtenir l'éveil. Mais en Chine, il fit la rencontre de
maître Tendô Nyojo. Et ce dernier lui affirma que "partiquer Zazen, c'est
juste rejeter la conscience du corps et de l'esprit. Si nous pratiquons
simplement Zazen, nous pouvons arriver à l'état (d'éveil) immédiatement,
dès le début." En l'entendant de la bouche de maître Tendô Nyojo, maître
Dôgen se rendit compte de ce qu'était l'éveil. Et il observa que le
premier éveil est toujours de tout simplement pratiquer Zazen.
(3) Le véritable Eveil
Le véritable éveil dans le Bouddhisme, ce n'est que la pratique même de
Zazen. Dans la civilisation euro-américaine, dont nous avons reçu tant de
bénfices, il y a deux sortes de valeurs. L'une est la considération
intellectuelle très forte et précise, qui a produit tant de grands
philosophes; l'autre est la beauté sensuelle claire et directe, qui a
produit tant d'excellents artistes.
Cependant, dans le Bouddhisme, nous nous efforçons de transcender les
considérations intellectuelles et les perceptions sensorielles, afin de
découvrir le monde véritable.
C'est pourquoi, lorsque nous équilibrons notre système nerveux autonome en
nous fondant sur la pratique de Zazen, le système nerveux sympathique, qui
est la cause des pensées intellectuelles, et le système parasympathique,
qui est à la base des perceptions des sens, arrivent à plus ou moins zéro,
et nous, êtres humains, pouvons vivre dans le monde réel, directement dans
le monde de la vérité. Cela n'est que le premier éveil. Autrement dit,
lorsqu'on pratique Zazen tous les jours, et qu'on maintient l'équilibre de
son système nerveux autonome, à ce moment précis, nous sommes éveillés.
Et si nous poursuivons tous les jours la pratique de Zazen, nous
pouvons profiter de cet équilibre tous les jours et penser à tous ces
problèmes philosophiques sur la base du réalisme, mettant de côté et
l'idéalisme et le matérialisme. Je crois que cette expérience comprend le
pouvoir précieux et immense d'effacer nos habitudes de vie précédentes,
idéalistes ou matérialistes, ce qui nous permet de vivre complètement dans
la réalité. Lorsque tous ces problèmes ont été résolus, alors vient un
entendement parfait qu'on pourrait appeler second éveil.
Si on lit les exemples des maîtres bouddhistes chinois, par exemple maître
Joshu Jushin, et maître Reiun Shigon, il leur a fallu plus de 30 ans pour
arriver à ce second éveil. c'est assez long. Mais il est inutile de s'en
soucier, car si on pratique Zazen tous les jours, on peut entrer sans
délai dans l'éveil lui-même. Autrement dit, si on l'a tous les jours,
inutile de s'en préoccuper.
(4) Les concepts de vacuité (Ku), ou de néant (Mu), sont
complètement erronés.
Dans les sociétés bouddhistes, de nos jours, nombreux sont ceux qui
insistent que la philosophie bouddhiste fondamentale est une sorte de
nihilisme, et de nombreux penseurs bouddhistes affirment que la théorie
bouddhique fondamentale dit que ce monde n'est pas réel, et que des
pensées aussi nihilistes sont le Bouddhisme.
Je crois pour ma part que cette interprétation du Bouddhisme est
totalement fausse. Ce malentendu nihiliste provient d'une traduction très
incorrecte du Mûlamadhyamakâkarikâ de maître Nâgârjuna par Kumarajiva,
spécialiste chinois de la littérature indienne. Le Mûlamadhyamakâ-karikâ
fut rédigé aux environs du troisième siècle de l'Ere courante par
Nâgârjuna, et traduit en chinois au quatrième siècle par Kumarajiva. Mais
si l'on lit le Mûlamadhyamakâ-kârika directement en sanscrit, il devient
très clair que Kumarajiva n'avait pas du tout compris le sens véritable du
Mûlamadhyamakâ-karikâ. (A partir d'ici, je ferai usage de l'abbréviation
MMK). Mais cette traduction avait été effectuée sous commission du
gouvernement chinois, et c'est pourquoi c'est cette version qui fut
autorisée en Chine, avec l'énorme influence que cela put avoir sur les
autres sociétés extrême-orientales. C'est pourquoi dans le Bouddhisme
Mahâyana extrême-oriental, les spécialistes prétendent habituellement que
le Bouddhisme est une sorte de nihilisme, et que le monde n'est pas réel,
mais bien plutôt une image abstraite de la vacuité.
Pourtant, si on lit soigneusement le MMK dans
le texte original sanscrit, on peut observer qu'il n'est qu'un exemple de
la pensée bouddhique fondamentale, qui explique que le Bouddhisme n'est
autre qu'un réalisme, où l'on croit que ce monde existe réellement.
(5) Le réalisme dans le MMK
Quand on en lit le texte sanscrit original, il devient très clair qu'il y
est affirmé que le Bouddhisme est une philosophie réaliste. Sans le
moindre doute. Le MMK se répartit en 27 chapitres, mais la seule lecture
du premier suffit à démontrer ce réalisme sans faille.
Ce premier chapitre s'intitule en sanscrit "pratyaya", qui signifie
croyance, ou foi. On peut alors l'interpréter comme la proclamation
par Nâgârjuna de la pensée bouddhique fondamentale, qui imprègne tout
le livre. Ici, Nâgârjuna écrit que ce monde est le monde réel, où
tout existe réellement tel quel. C'est pourquoi j'ai choisi le titre de
"Faits fiables" pour intituler ce premier chapitre, dans ma traduction
anglaise.
Ce premier chapitre comprend 14 versets. Dans le
premier, Nâgârjuna soutient que la "subjectivité" n'est pas réelle,
ainsi que l'"objectivité". "Subjectivité" veut rendre le mot sanscrit
"svata", et "objectivité" traduit le mot sanscrit "parata". J'interprète
ce mot de subjectivité comme étant nos pensées, produites par notre
cerveau, et le mot d'objectivité représente nos perceptions sensorielles,
et leur stimulations des organes des sens. Je comprend donc que Nâgârjuna
soutenait que les idées, produites par notre cerveau, et les perceptions,
excitations des organes des sens, ne sont pas plus réelles les unes que
les autres. Je pense donc que Nâgârjuna nie tout autant l'existence réelle
des idées que celle des stimuli sensoriels. ce qui suggérerait que
Nâgârjuna nie fondamentalement tout autant les philosophies
idéalistes que les philosophies matérialistes.
Je pense que cette idée bouddhique, qui nie l'idéalisme et le
matérialisme, est un point très important, si l'on veut comprendre
la philosophie bouddhique, car la négation absolue de l'idéalisme et du
matérialisme dans le Bouddhisme suggère une critique sévère des
considérations intellectuelles. Cependant, où pourrions-nous trouver
une philosophie qui ne serait pas intellectuelle? En rapport avec cette
question, le Bouddhisme affirme fondamentalement l'existence d'une
philosophie pratique, différente dimensionnellement d'une philosophie
intellectuelle. Donc, quoique cette sévère négation de l'idéalisme et du
matérialisme puisse passer pour une affirmation nihiliste, ce qui fut
l'interprétation erronée de Kumarajiva, ce n'est absolument pas le cas.
Nous pouvons nous en assurer parce qu'au second verset du premier
chapitre, Nâgârjuna indique quatre entités qui sont existence réelle. La
première est la raison, ou loi de l'Univers, qui imprègne l'Univers tout
entier. La seconde est le monde extérieur où nous vivons à cet instant. La
troisième est l'instant présent, lorsque notre acte est accompli. La
quatrième est la Réalité elle-même, qu'on peut identifier à Dieu. Et
Nâgârjuna affirme crânement qu'il n'y en a pas de cinquième. Si donc on se
fie à son attitude décidée, on peut supposer qu'il avait une forte
confiance en son propre réalisme.
Au quatrième verset du premier chapitre, il dit que ces quatre facteurs de
réalité s'identifient à notre action humaine à l'instant présent.
Au 9ème verset, il soutient que notre action réelle à l'instant présent
dans notre vie de tous les jours se confond avec l'Univers tout entier.
Autrement dit, notre acte réel à l'instant présent au quotidien n'est en
rien différente de l'Univers.
Et je crois que ce réalisme de Nâgârjuna doit bien être le même que celui
du Bouddha Gautama, celui de maître Bodhidharma et celui de maître Dôgen.
(6) Un emplacement pour Zazen
L'emplacement pour pratiquer Zazen n'a pas nécessairement besoin d'être
vaste, mais maître Dôgen dit: "Il nous suffit de disposer d'une place où
nous pouvons disposer notre corps."
(7) La posture
En Zazen, la bonne posture est très importante, et maître Dôgen la décrit
très précisément: nous n'avons donc qu'à suivre sincèrement ses
instructions. Par exemple, même dans certains écoles bouddhistes au Japon,
on peut trouver des exemples ou on se sert d'une chaise, mais je crois
qu'il vaut mieux éviter ce genre de compromis.
L'aspect le plus important de la posture en Zazen consiste à maintenir la
colonne vertébrale droite, des lombaires aux cervicales en passant par les
dorsales, et de tenir la tête un peu en arrière, en une ligne droite et
verticale, autant que possible. Pour ce faire, il faut tirer le menton en
avant et vers le bas autant que possible, afin de fixer l'ensemble de la
colonne. Sans cela, il nous serait difficile d'éviter les considérations
intellectuelles pendant la pratique. Une posture relâchée peut devenir
cause d'irritation à cause de la difficulté à cesser de penser.
(8) Méthode de respiration
Même si les méthodes de respiration en Zazen sont nombreuses, qui ont été
transmises par tradition ou par des légendes dans les écoles bouddhistes,
je pense que pour nous, en la matière, il vaut mieux suivre l'enseignement
de maître Dôgen, tel qu'il nous le donne au chapitre 5 du Eihei-koroku
(qui contient 390 paragraphes), et qui est une archive de ses conférences
dans la Salle de Dharma. A propos du Eihei-koroku, il en existe une
édition très fidèle, produite par maître Kishizawa I-an à la librairie du
temple Eihei-ji, il y a quelques décennies. L'abbé de ce temple, maître
Niwa Rempo, a fait réimprimer cette version (publiée par Kanazawa Bunko, à
Tokyo). Il me parait donc qu'il vaudrait mieux se baser sur cette édition.
Dans le Eihei-koroku, même lorsqu'il décrit la méthode de respiration en
Zazen, maître Dôgen souligne l'importance de maintenir la bonne posture
très exactement, et ensuite, il décrit la méthode de respiration. On y
voit à quel point il vénère cette posture correcte.
D'abord, maître Dôgen nie la régulation de la respiration, ainsi que la
pratique de maintenir l'esprit au niveau le plus élevé, telles qu'elles se
pratiquent dans le Bouddhisme Hinâyana. On peut y déceler que maître Dôgen
reconnait implicitement que le Bouddhisme n'est absolument une philosophie
idéaliste, et que ces efforts idéalistes qu'il voit dans le Bouddhisme
Hinâyana ne peuvent pas être le Bouddhisme. C'est pourquoi il rejette la
méthode de compter ses respirations durant Zazen. Il refuse clairement ce
qu'il tient pour une méthode incorrecte.
Pour ce qui est du Bouddhisme Mahâyana, on y soutient parfois que lorsque
la respiration est longue, il faut reconnaître qu'elle est longue, et que
lorsqu'elle est courte, il faut reconnaître qu'elle est courte, bref que
nous devons accepter le fait réel tel qu'il est, et ne nous adonner à
aucune sorte d'effort intentionnel. Certains soutiennent donc qu'il
faut utiliser une méthode spéciale où on inspire par l'abdomen et qu'on
expire aussi par l'abdomen. Mais maître Dôgen nie également qu'il y ait
une telle méthode.
A la fin de sa conférence, il décrit sa propre opinion sur le problème de
la respiration, et il dit: "Lorsque nous sommes vigoureux, nous pratiquons
Zazen. Quand nous avons faim, nous mangeons nos repas, et alors nous nous
sentons satisfaits." Ces paroles suggèrent que la pratique de Zazen est
aussi notre activité vigoureuse dans la vie quotidienne, et qu'il ne nous
est donc pas nécessaire d'avoir des critères intellectuels ou des
habitudes particulières. Maître Dôgen nous encourage à juste profiter de
la pratique de Zazen, sans nous soucier d'intreprétations intellectuelles.
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