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© Nanabozho (Gichi Wabush)
Mis à jour le 4 novembre 2003

 

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Shiho (Transmission du Dharma) bis.

 

Le mois dernier, j'ai relaté comment j'avais reçu la Transmission du Dharma de maître Gudo Nishijima.

En même temps que moi à recevoir cette transmission, il y avait le dirigeant du dôjô Zen de Villeurbanne, en région lyonnaise. Cet homme traversait à ce moment un moment difficile, sujet qu'il était à des pressions psychologiques très fortes de la part du dirigeant du dôjô zen de Lyon pour qu'il laisse tomber ce nouveau dôjô (réflexe de "commerçant" craignant la concurrence?), et il avait voulu combiner un voyage (rêvé) au Japon, et la pratique. Face à cette sincérité, et à cet engagement, maître Nishijima lui a offert de lui accorder sa transmission à lui aussi. (Je rappellerai ici, pour que les choses soientclaires, que pas plus lui que moi, n'avions sollicité cette transmission, qui relève donc exclusivement du bon vouloir et jugement de maître Nishijima).

C'est donc au cours d'une même cérémonie que lui et moi avons reçu cette transmission, faisant de nous les descendants du Bouddha à la quatre-vingt onzième génération. Ce qui fait de nous des "frères jumeaux de Dharma". En effet, dans une perspective héritée des Chinois, par la transmission, on entre dans la grande famille des patriarches, et on devient les "fils" du maître transmetteur, les "frères" des autres personnes à qui ce dernier a transmis, les "neveux"de ceux qui ont reçu la transmission du même "ancêtre" que le maître, et ainsi de suite.

Nous voilà donc les "neveux" d'au moins deux enseignants français notables dans ce domaine...

L'autre jour, lorsque j'ai communiqué sur une liste bouddhiste que j'avais reçu cette transmission, certains commentaires ont été émis, laissant entendre que quelqu'un qui prétendrait enseigner sans être parfaitement réalisé serait un borgne qui voudrait mener des aveugles. D'autres commentaires ont prétendu que nous dévaluions la transmission. Il m'a semblé que ces deux éléments méritaient réponse. Spécifions d'abord que la première venait des milieux "tibétains" et que la seconde provenait des milieux "zen".

Pour ce qui est de la première objection, j'ai eu l'impression très nette que ce qui a choqué mes interlocuteurs "tibétains", c'est que j'affirme être faillible, humain, et avoir encore du chemin à parcourir. Le modèle étant bien entendu un enseignant mythique, parfaitement réalisé, auquel on puisse s'abandonner les yeux fermés pour qu'il nous emmène sur l'autre rive. Or, quand je lis le Canon Pali, force m'est de constater que le Bouddha prend parfois des décisions que lui contestent ses proches, et que ces derniers, par l'argumentation appropriée, arrivent à faire changer d'avis au Béni du Ciel. Force m'est aussi de constater que bon nombre de pratiquants bouddhistes orientaux, y-compris de rite tibétain, dénoncent l'excès de vénération dans lequel est tenu tout lama, chez nous, ce qui est quand même moins le cas chez eux (J'ai un jour entendu une comparaison avec nos anciens curés de campagne, qui bénéficiaient d'un respect de fonction, certes, mais sans plus, à moins de le mériter réellement. Mais l'excès de zèle des néo-convertis peut amener n'importe quel homme normalement constitué à déraper. C'est implicitement ce qui a amené quelqu'un comme Dagpo Rimpoché à mettre ses voeux de côté, afin de ne pas entacher son éthique. Tout le monde n'en a pas fait autant.

La deuxième objection rejoint en fait la première. Jusqu'ici, la Transmission du Dharma donnait à son détenteur une aura de perfection qui a amené plus d'une personne à déclarer qu'untel ou untel était un "maître parfaitement réalisé", ce qu'un minimum d'esprit critique aurait permis de démentir. L'expérience a montré, autant aux Etats-Unis (voir l'article de Stuart Lachs) qu'ici les abus de pouvoir qu'une telle attitude peut engendrer.

Or donc, voici deux choses. L'une, c'est que la première objection semble provenir d'esclaves qui ont peur que leurs seigneurs n'aillent les abandonner à une liberté dont ils ne sauraient que faire; Et que la seconde semble provenir de seigneurs qui craignent qu'on ne réduise à néant ce qui leur lie leurs esclaves. Je regrette, mais le Bouddhisme n'est pas une école de la servitude. Le maître (au strict sens d'enseignant) ne doit être qu'un kalyanamitra, un "ami dans le Dharma", dont le but est d'amener l'élève à comprendre par lui-même le sens profond des enseignements. Evidemment, cela implique au minimum que l'enseignant sache de quoi il parle. Au moins un peu mieux que l'élève. Mais il restera toujours préférable qu'il soit entendu que l'élève doive tester le maître, pour éviter de s'être fait leurrer par un escroc spirituel. Je rappelle que ceux-ci sont légion, et que la véritable caractéristique d'un escroc, c'est précisément qu'on lui fait confiance (je rappelle qu'un escroc à qui personne ne ferait confiance ne pourrait escroquer personne...). Si on part du principe que l'enseignant est infaillible, comment le tester? Seuls les bouddhas peuvent reconnaître d'autres bouddhas. Il est donc impossible à priori à un aspirant au Dharma de reconnaître si son maître en est un ou pas. Sauf à vérifier au jour le jour si ce qu'il enseigne, dans son application à la vie quotidienne, est profitable ou non.

C'est là de toute façon l'enseignement du Bouddha Gautama lui-même. Si le fait que des gens honnêtes et irréprochables dans leur vie quotidienne (je pense spécifiquement à maître Nishijima) donnent leur transmission à des gens honnêtes et qui s'efforcent tant bien que mal d'être eux aussi irréprochables, décrédibilise des personnes à qui
on pourrait reprocher des choses, dont la moindre serait de ne pas être sincèrement attachés à la libération des êtres, alors, allons-y gaiement.

Depuis les temps les plus anciens, la transmission a représenté beaucoup de choses contradictoires. Mythiquement, elle représentait une reconnaissance de la réalisation de l'élève. Mais soyons sincères. Dans la réalité, cela n'a représenté qu'une minorité des cas. La plupart du temps, la transmission a servi à nouer des liens de clientèle, à s'attirer les faveurs de grands du monde, à élargir des liens d'alliance et de relations personnelles. Notez bien que cela n'exclut en rien qu'elle ait effectivement pu être une reconnaissance de la réalisation de l'élève. Mais si on admet tous ces autres aspects comme étant naturels, on évitera de les balayer sous le tapis et d'accréditer une version mythologique par laquelle quelqu'un qui est détenteur de la transmission doit être obligatoirement respecté et obéi, de ce simple fait. La transmission est une responsabilité. Si on la dépouille d'une partie de son aura malsaine, elle pourra moins aisément servir de caution aux délires autoritaires des skinheads déguisés en moines.

Mxl




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