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Cette page a été mise à jour le 6 juillet 2008

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Les enseignements de Gudo Wafu Nishijima Rôshi

Bref historique du Bouddhisme japonais après Meiji,

important pour comprendre l'évolution récente du Zen japonais

©Windbell Publications

Le Bouddhisme japonais et la Restauration de Meiji


La Restauration de Meiji qui a emporté le Japon en 1868, bien plus qu'une "restauration" fut en fait une véritable révolution, qui affecta tous les niveaux de la société. De puissants états féodaux, dont le Satsuma (aujourd'hui préfecture de Kagoshima), le Nagato (aujourd'hui préfecture de Yamaguchi), le Tosa (aujourd'hui préfecture de Kochi), et le Hizen (aujourd'hui préfecture de Saga), se liguèrent pour lever une armée contre le gouvernement Tokugawa de l'époque, dans le but de prendre la capitale Edo (aujourd'hui Tôkyô). Une succession de guerres civiles s'ensuivit et le dernier shogun Tokugawa, Yoshinobu (1838-1913), prit la décision de restaurer le pouvoir de la maison impériale qui avait dirigé le Japon depuis la fondation de l'état jusqu'en 1192. Le résultat fut une révolution dont l'impact sur toutes les facettes de la vie, culturelles, économiques et politiques, fut sans précédent.

Haibutsu Kishaku 

L'un des slogans de la Restauration de Meiji fut "Osei Fukko" : Restaurer la Monarchie. Il s'agissait d'encourager la population dans son enthousiasme à détruire toutes les habitudes culturelles et les  institutions qui avaient été centrales pendant l'ère Tokugawa. Le Bouddhisme n'y échappa pas. Pendant environ cinq ans à partir de la Restauration de Meiji fit rage un mouvement populaire de destruction du Bouddhisme : de nombreux temples furent détruits et des milliers de moines et nonnes bouddhistes furent renvoyés de force à la société civile. Ce mouvement reçut le nom de "Haibutsu Kishaku". "Hai" signifie rejeter et "butsu" », le Bouddha ; "Ki" veut dire abolir et "shaku" renvoie à Shakyamuni (le Bouddha Gautama). "Rejeter le Bouddha et abolir Shakyamuni !" Ce mouvement eut un effet irréversible sur le Bouddhisme japonais, malgré les efforts pour protéger les traditions. Le flot implacable de l'Histoire balaya tout sur son passage. 

Qu'est-ce que le bouddhisme?

Pour commencer, je voudrais expliquer ce qu'est le Bouddhisme. On pourrait tirer une image très confuse et vague de ce dont il s'agit si on considère la situation du Bouddhisme dans le Japon moderne.  Les points de vue sont nombreux et différents, du romantisme intellectuel d'un D. T. Suzuki, aux interprétations entièrement académiques du Bouddhisme basées sur la Mûlamadhyamakâkarikâ de maître Nâgârjuna, arrivé par l'intermédiaire du chinois (traduction de Kumarajiva) et traduit en japonais en tant que « Churon », en passant par les théories du « rien » de Kitaro Nishida. L'étude de ces différentes théories japonaises contemporaines ne donnera jamais une description claire de ce qu'est le Bouddhisme. Qui plus est, la fin de la seconde Guerre Mondiale a vu surgir de nombreuses sectes bouddhistes, promettant aux croyants de grands bénéfices et le bonheur dans leur vie séculière. Rien de tout cela ne donne une idée claire des doctrines centrales du Bouddhisme, et on n'y trouve encore moins d'idée fondamentale qui recevrait l'agrément de tous.

Quand j'avais 18 ans, j'ai fait la connaissance d'un moine bouddhiste de l'école Sôtô du nom de Kôdô Sawaki rôshi. C'est à partir de là que j'ai été attiré par les écrits de maître Dôgen et, en particulier, son Shôbôgenzô. Je l'étudie maintenant depuis plus de 60 ans et la compréhension que j'en ai est désormais complète. Je donne régulièrement, depuis une trentaine de ces années, des cours à la Young Men's Buddhist Association de l'Université de Tôkyô, au Centre Culturel Asahi et d'autre endroits. Ma longue étude du Shôbôgenzô m'a permis d'arriver à une compréhension claire et exacte de la philosophie bouddhique. Cependant, j'avais toujours considéré maître Dôgen comme n'étant que l'un des nombreux penseurs bouddhistes, et croyais que l'on ne pouvait limiter le Bouddhisme à sa seule pensée. Pourtant, il y a une dizaine d'années, je me suis mis à lire en sanscrit la Mûlamadhyamakâkarikâ de maître Nâgârjuna et j'ai ensuite entrepris de le traduire directement en japonais. Au fur et à mesure qu'en avançait la traduction, j'ai vu que les idées qui y étaient avancées correspondaient exactement à celles du Shôbôgenzô.

J'en ai conclu que, reliant les nombreuses interprétations philosophiques du Bouddhisme, existait une théorie authentique que l'on peut appeler « Shôbô » ou « Vrai Dharma ». Quoiqu'elle soit complexe, elle possède une structure particulière mais rationnelle qui se reflète dans les écrits de maître Nâgârjuna comme dans les travaux de maître Dôgen. Je suis convaincu que cette structure théorique décrit exactement ce qu'est le Bouddhisme. Mais étant très inhabituelle, elle est difficile à comprendre. C'est une des raisons pour laquelle le Bouddhisme a si souvent été mal compris par tant de gens.


La suite: La philosophie de la Mûlamadhyamakâkarikâ


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