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Cette page a été mise à jour le 8 juillet 2008

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Les enseignements de Gudo Wafu Nishijima Rôshi

Bref historique du Bouddhisme japonais après Meiji

©Windbell Publications

(Suite)

La philosophie du Shôbôgenzô

(1) Affirmation de ce monde.
De nombreux chapitres du Shôbôgenzô affirment l'existence du monde concret. On en trouve des exemples dans le Genjô-kôan (L'Univers réalisé), l'Ikka-no-myôju (Une perle brillante), le Keisei-sanshiki (Les voix de la vallée de la rivière et la forme des montagnes), le Sansui-gyô (Le sûtra des montagnes et de l'eau), et le Hokke-ten-hokke (La fleur du Dharma devient la fleur du Dharma). Ces chapitres spécifiques, et bien d'autres parties du Shôbôgenzô, affirment que ce monde existe réellement. C'est un thème qui revient très souvent à travers tout l'ouvrage.

J'ai toujours nourri des doutes au sujet de la justesse des interprétations nihilistes du Bouddhisme qui sont répandues dans les cercles académiques du Japon d'aujourd'hui. Cependant, depuis que je sais que les affirmations réalistes de maître Nâgârjuna dans la Mûlamadhyamakâkarikâ découvert sont en ferme accord avec l'affirmation de ce monde dans le Shôbôgenzô, je pense qu'il est urgent d'effectuer un profond ré-examen des bases du véritable Bouddhisme.

(2) Réfutation de "Senni-gedo" (les penseurs non-bouddhistes comme Senika)
et de "Danken-
gedo" (Ucchedadrsti)

Au chapitre premier, Bendôwa (Propos sur le discernement de la Voie), maître Dôgen cite l'assertion qui suit: "Autrement dit, ce corps physique, étant né, se dirige nécessairement vers la mort; mais cette essence mentale ne meurt jamais". Il la commente alors: "La vue ici exprimée n'est absolument pas le Dharma bouddhiste; c'est le point de vue du non-bouddhiste Senika". Au chapitre 37, Shinjin-gakudô (L'étude de la Voie par le corps et par l'esprit), maître Dôgen cite le maître Hyakujo Ekai : "Si une personne s'attache à l'opinion qu'étant dès l'origine purs et libérés, nous sommes naturellement bouddha et naturellement un avec la Voie du Zen, [cette personne] appartient aux non-bouddhistes du naturalisme naturalisme".

Ces deux citations confortent confortent mon opinion que maître Dôgen réfute également les deux points de vue philosophiques fondamentaux: l'idéaliste qui croit en une essence spirituelle éternelle, et le naturalisme matérialiste qui croit en une perfection humaine innée et en une libération intrinsèque.

(3) Les quatre couches philosophiques.

Au chapitre 3, Genjô-kôan (L'univers réalisé), maître Dôgen décrit quatre points de vue philosophiques. Ce sont :

[1] Quand tous les dharmas sont [vus comme] le Dharma du Bouddha,
[2] Quand les innombrables dharmas sont chacun dénués de caractère propre,
[3] La Voie du Bouddha transcende fondamentalement l'abondance et le manque, et
[4] Même s'il en est ainsi, les fleurs tombent à notre regret et les mauvaises herbes poussent à notre déplaisir.

J'interprète ces quatre points de vue comme suit. "Quand tous les dharmas sont [vus comme] le Dharma du Bouddha" signifie quand toutes les choses et tous les phénomènes sont interprétés à travers un système de croyance appelé le Bouddhisme, ce qui suggère un point de vue idéaliste. "Quand les innombrables dharmas sont chacun dénués de caractère propre » se réfère à la situation où toutes choses et phénomènes sont examinés d'un point de vue non-subjectif, c.-à-d. objectif. "La Voie du Bouddha transcende fondamentalement l'abondance et le manque" signifie l'acte réel qui est séparé des critères objectif et subjectif. "Même s'il en est ainsi, les fleurs tombent à notre regret et les mauvaises herbes poussent à notre déplaisir" est une description du véritable état des choses --- la réalité.

(4) Vénération pour l'action et pour la pratique de Zazen

Le Shôbôgenzô contient de nombreux chapitres qui ont trait à l'action. Les exemples incluent le Bendôwa (Propos sur le discernement de la Voie), le Genjô-kôan (L'univers actualisé), le Ju-undô-shiki (Règlements pour la salle du Nuage Lourd), le Senjô (Laver), et le Shoaku-makusa (Ne pas faire le mal). Ceci renforce ma conviction que la philosophie bouddhique concerne l'action à proprement parler. Tous nous avons deux capacités fondamentales : celle de penser et celle de percevoir. En utilisant notre capacité de penser, nous avons établi les philosophies idéalistes les plus excellentes. En nous fiant à notre capacité à percevoir, nous avons établi des théories scientifiques exceptionnelles. Mais le Bouddha Gautama avait remarqué qu'aussi excellentes que soient ces deux capacités, elles ne forment pas la base de notre vie ; il avait remarqué que cette dernière est en fait une série d'actions à l'instant présent. Sa prise de conscience de ce fait a formé la base du Bouddhisme, avec un système philosophique fondé ni sur l'idéalisme ni sur le matérialisme. C'est pour cette raison que la philosophie bouddhique est si difficile à comprendre. Une étude détaillée du Shôbôgenzô nous le révèle clairement et maître Dôgen, tout comme le Bouddha Gautama l'avait fait avant lui, nous presse de pratiquer Zazen afin de remarquer la réalité, qui forme la base de la croyance bouddhique. Il soutient que c'est en pratiquant Zazen que nous pouvons remarquer la nature de la réalité devant nous, et prendre conscience de ce qu'est l'action.

Le bouddhisme avant la Restauration de Meiji

Il semblerait que ce système de pensée bouddhique développé par maître Dôgen et par maître Nâgârjuna ait été perdu pour les bouddhistes japonais contemporains. C'est pourquoi il est important de vérifier s'il existait dans le Japon d'avant Meiji. On peut résoudre le problème en examinant les travaux de maître Bokuzan Nishi-ari (Kin-ei). Voici une brève chronologie de sa vie:
1821    Naissance à Hachinohe dans la préfecture d'Aomori, le fils de Chozaburo Sasamoto.
1833    Devient moine bouddhiste sous la direction de maître Choryu Kinryu au temple            
            Choryu-ji à l'âge de 12 ans, et y étudie le Bouddhisme pendant 7 ans.

1839    Départ pour Sendai pour y étudier le Bouddhisme avec le maître Ten-ô Etsu-on au
           temple Sho-on-ji.
1841    Entrée au monastère du temple Kichijo-ji à Edo (aujourd'hui Tôkyô).
1842    Devient moine certifié et reçoit la Transmission du Dharma de maître Anso Taizen au
           temple Hon-nen-ji à Edo. Devient maître du temple Hôrin-ji à Edo.
1850    Etudes avec Gettan Zenryu au temple Kaizô-ji de la préfecture de Kanagawa , très
           fameux pour son étude du Shôbôgenzô.
1862    A partir de 1862, Nishi-ari devient maître des temples suivants l'un après l'autre :
           Nyorai-ji (préf. de Shizuoka), Eicho-in (préf. de Kanagawa), Sosan-ji (Tôkyô), Hosen-ji
           (préf. de Gunma)
Après la Restauration de Meiji en 1868, les moines bouddhistes reçoivent la permission
           d'utiliser leurs noms de famille, c'est pourquoi il enregistre son propre nom de famille
           comme étant Nishi-ari.
1875    Après 1875, il devient maître des temples suivants l'un après l'autre : Hokô-ji  (préf. de
           Aomori), Chu-ô-ji (Hokkaidô,) Kasuisai (préf. de Shizuoka), et Denshin-in (préf. de
           Shizuoka).
1899    Un mécène lui construit un temple, appelé Saiyu-ji, à Yokohama.
1901    Devient l'abbé du Soji-ji (préf. d'Ishikawa), l'un des deux temples principaux de l'école
            Sôtô.
1910    Décès à Yokohama le 4 décembre, à l'âge de 90 ans.

Par cette biographie, on peut voir que Bokuzan Nishi-ari a étudié le Bouddhisme dans la tradition de l'école Sôtô avant la Restauration de Meiji, et avant que les universités du Japon n'exercent une influence quelconque sur la pensée bouddhique. Il est heureux que ses nombreuses conférences sur le Shôbôgenzô aient été conservées dans son Shôbôgenzô Keiteki et soient disponibles aujourd'hui. Grâce aux compte-rendus de ses conférences, nous pouvons nous faire une image nette de sa compréhension du Bouddhisme. Le Shôbôgenzô Keiteki contient les 29 chapitres suivants :

Bendôwa
(Propos sur le discernement de la Voie),
Maka-Hannya-Haramitsu
(Maha-Prajña-Paramita),
Genjô-kôan
(L'univers actualisé),
Ikka-no-myoju (Une perle brillante),
Sokushin-zebutsu
(L'esprit en soi est Bouddha),
Uji
(Existence-Temps),
Sansui-gyô
(Le Sûtra des montagnes et de l'eau),
Shin-fukatoku (L'esprit ne peut être appréhendé [Premier]),
Kokyo
(Le miroir éternel),
Kankin
(Lecture des sûtras),
Bussho
(La nature de Bouddha),
Gyobutsu-yuigi
(Le comportement digne du Bouddha en action), Jinzu (pouvoir mystique), Zazenshin (Une aiguille pour Zazen),
Butsukojo-no-ji
(Le sujet de l'état ascendant de Bouddha),
Inmo (Ça),
Kai-In-Zanmai
(Samadhi, un état comme la mer),
Juki
(Affirmation),
Kannon
(Avalokiteçvara),
Arakan
(L'Arhat),
Hakujushi
(Les Cèdres),
Komyô (Luminosité),
Shinjin-gakudô
(Etude de la Voie par le corps et par l'esprit),
Muchu-setsumu (Prêche d'un rêve dans un rêve),
Gabyo
(Image d'un gâteau de riz),
Sesshin-Sessho
(Développer l'esprit et développer la nature),
Shohô-jisso
(Tous les dharmas sont la vraie forme),
Mujo-seppo
(Le non-émotionnel prêche le Dharma)
et Shoji (Vie et mort)).


La suite: La philosophie de maître Bokuzan Nishi-Ari


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Dogen Sangha

 

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