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Cette page a été mise à jour le 5 décembre 2006

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[Repris du blogue de Gudo Wafu Nishijima rôshi]

6/11/2006

Gakudô-yôjin-shu 

Gakudo-yojin-shu (4) 

(Suite du texte)

No.6 Ce que nous devons savoir en pratiquant zazen

La pratique de zazen est la poursuite de la vérité sont de grandes tâches tout au long de notre vie --- à ne pas prendre à la légère. Comment pourrions-nous nous montrer téméraires en les mettant en pratique? Les gens (qui recherchaient la vérité) du passé se sont coupé le bras ou les doigts; ce sont là d'excellents exemples venus de Chine. Il y a longtemps, le bouddha Gautama a quitté sa famille et abandonné son royaume; cela aussi est un précédent pour la pratique de la vérité.

Aujourd'hui, les gens disent que nous devons avoir une pratique facile. Mais ces paroles sont totalement erronées. Elles ne sont absolument pas conformes au Bouddhisme. Même si nous choisissions de pratiquer quelque chose d'aussi facile que de rester étendu sur un lit, cela finirait par être fatigant. Et si nous nous permettions de nous laisser ennuyer par notre seule pratique, tout notre travail deviendrait fatigant. Inutile de dire que les gens qui aiment les pratiques faciles n'ont pas la bonne constitution pour rechercher la vérité.

Loin d'être faciles, les enseignements qui se sont répandus de par le monde ne sont que l'enseignement que le grand maître le Bouddha Gautama a atteint par des pratiques ardues et douloureuses à travers des temps sans commencement. La source originelle était ainsi. Comment les torrents pourraient-ils être faciles? Qui aime la vérité ne doit jamais se proposer une pratique facile, car alors, ils ne pourraient jamais s'appuyer sur un terrain solide, et auraient du mal à arriver au dépôt du trésor.

Il y a eu par le passé des gens de grande habileté et même eux ont dit que leur pratique était difficile. Il nous faut reconnaître la profondeur et la grandeur de la vérité bouddhique. Si le Bouddhisme avait été facile à pratiquer, dès l'origine, ces gens de grande capacité n'auraient pas déclaré que le Bouddhisme est difficile à pratiquer et difficile à comprendre. En comparaison de ces gens, dans l'histoire, ceux d'aujourd'hui ne valent pas un poil sur un troupeau de neuf taureaux. Même si nous rassemblons toutes nos maigres ressources et notre peu de connaissances, et que nous nous efforçons à la difficile pratique, nous ne pourrons jamais arriver àce quie était facile à comprendre et à pratiquer pour ces vieux maîtres.

Quelle est donc cette chose que nos contemporains aiment à comprendre et pratiquer avec facilité? Ce n'est pas un enseignement séculier, et pas non plus un enseignement bouddhique; cela ne pas valoir la pratique des démons du ciel ou de ceux du sol. Cela ne peut valoir la pratique des non-bouddhistes ou celle des bouddhistes intellectuels et sensuels. Cela ne peut qu'être appelé la pratique très erronée et pleine d'illusion des gens ordinaires. Et même si ceux qui la recherchent entendent sortir de la société séculière, leurs vies quotidiennes n'en seront pas moins prises dans un cycle sans fin de misérable vie et mort.

Aussi dur qu'il soit de nous rompre les os et de nous broyer la moelle, la chose la plus difficile reste d'équilibrer notre esprit. Aussi dur qu'il soit de garder les préceptes et de maintenir une conduite pure, le plus difficile reste d'équilibrer notre conduite corporelle. S'il valait la peine de nous réduire les os en poudre, ceux, nombreux, qui endurèrent de telles austérités depuis les temps anciens auraient atteint les enseignements du Bouddha Gautama, alors que rares sont ceux qui y sont arrivé.

S'il valait la peine d'être un homme de conduite pure, nombreux seraient les puritains qui auraient atteint la vérité, depuis les temps anciens. La raison en est qu'il est très difficile à quiconque de maintenir son mental en état d'équilibre.

La perceptivité n'a pas d'importance. Pas plus que l'entendement scholastique. Le mental, la volonté, la conscience ne sont pas primordiaux. Les images mentales, les pensées et les réflexions ne le sont pas non plus. Sans jamais s'en servir, des gens ont pu, par le passé, faire l'expérience de l'état d'équilibre du corps-et-esprit, et entrer dans la Vérité bouddhique. C'est ce que voulait dire le Bouddha Gautama quand il a dit que le Bodhisattva Avalokitesvara avait changé de direction et avait perdu la conscience de sa perception. Quand il est clair que deux faces – le mouvement et le calme – n'apparaissent pas réellement, c'est alors qu'apparaît l'état d'équilibre.

Si on pouvait entrer dans la vérité bouddhique grâce à la perceptivité et à l'érudition, le grand prêtre Jinshu aurait été un homme de la vérité. Si la vérité bouddhique était contraire à la vulgarité ou à la bassesse sociale, comment le patriarche du Mont Sokei1 aurait-il pu obtenir la vérité bouddhique? Il est bien évident que la transmission et la réception du Bouddhisme se situent au-delà de la perceptivité et de l'érudition. Si on cherche des faits, on obtient des faits; et si on réfléchit aux faits, on fait l'expérience du Bouddhisme.

Nous ne nous préoccupons pas d'être vieux et flétri, ni d'être jeune et fringant. Maître Joshu était dans la soixantaine lorsqu'il s'est mis en quête de la vérité, mais il devenu un excellent maître dans la lignée de maître Bodhidharma. Une fille de la famille Tei commença son étude du Bouddhisme à l'âge de treize ans, et continua jusqu'à devenir un membre excellent d'un temple bouddhiste.

La dignité des enseignements du Bouddhisme n'apparaît que si nous nous comportons en bouddhistes, et nous ne pouvons distinguer cette dignité que si nous en faisons l'expérience.

Les érudits vétérans des enseignements théoriques du Bouddhisme et les experts en enseignements séculiers peuvent tous un jour découvrir zazen. Il y a eu de nombreux exemples de ceci: maître Eshi du Mont Nangaku était un homme aux multiples talents, mais il a quand même étudié avec maitre Bodhidharma. Maître Yoka Gengaku était un personnage éminent, ce qui ne l'a pas empêché d'étudier le Bouddhisme avec maître Daikan Eno.

On peut dire que la réalisation des enseignements bouddhiques et l'obtention de la vérité reposent sur l'étude avec un maître. Quand on visite un maître bouddhiste, et qu'on étudie avec lui, il faut écouter ce qu'il dit sans tenter de le contrer avec ses propres vues. Si on compare ce que le maître dit avec ses vues propres, on ne pourra pas profiter de ses enseignements.

Si vous rendez visite à un maître et que vous écoutez ses enseignements, purifiez votre corps-et-esprit, et calmez vos yeux et vos oreilles. Entendez simplement les enseignements du maître, et ne les mélangez pas avec d'autres images. En unifiant votre corps-et-esprit, soyez comme une cruche prête à être remplie d'eau. Alors, sûrement, vous pourrez recevoir les enseignements du maître.

Les sots d'aujourd'hui mémorisent des phrases tirées de livres, ou tirent de la connaissance des ancêtres bouddhistes, puis tentent de les comparer à ce que dit le maître. A ce moment-là, ils n'ont que leurs propres vues ou les paroles des ancêtres du assé. Il ne sont absolument pas prêts pour les paroles du maître.

Il y a aussi ceux qui, donnant la primauté à leurs propres vues, ouvrent les sûtras bouddhiques, en apprennent deux ou trois mots par coeur, et considèrent qu'ils ont reçu les enseignements bouddhiques. Ensuite, lorsqu'ils ont rendu visite à des maîtres à la claire compréhension et à des maîtres de l'enseignement fondamental, si ce qu'ils entendent est semblable à leurs propres vues, ils affirment les enseignements, mais s'ils ne sont pas conformes à leur propres vieilles opinions, ils les nient.Sans savoir comment rejeter les enseignements erronés, comment pourraient-ils jamais remonter sur la bonne voie? Il se pourrait bien que, même des éons sans limites, ils restent dans l'illusion. Ce serait bien dommage, n'est-ce pas?

Les étudiants bouddhistes doivent savoir que la vérité bouddhique se situe au-delà de la pensée, de la discrimination, de la supposition, de la réflexion, de la perception ou de la compréhension. Nous passons nos vies à folâtrer au sein de ces choses, et donc, si la vérité bouddhique existe en elles, pourquoi ne l'avons-nous pas encore réalisée? Les étudiants de la vérité ne doivent pas se reposer sur les facultés de pensée, de discrimination, et ainsi de suite. En même temps, nous sommes toujours équipés de pensée et d'autre facultés, et si nous les appliquons avec notre propre corps, et examinons notre situation, alors c'est comme si nous regardions dans un clair miroir.

La porte d'entrée dans cette situation bouddhiste n'existe que sous le contrôle de maîtres qui ont atteint la vérité et qui ont complètement. réalisé la porte. Elle est totalement hors de la portée de ceux qui n'enseignent que des mots.


Quinze jours après l'équinoxe de printemps (dans le calendrier lunaire), seconde année de l'ère Tenpuku (1234).


(Commentaire)

Dans ce chapitre, maître Dôgen dit que pour nous, au cours de notre vie humaine, la tâche la plus importante est de pratiquer zazen et d'étudier le Bouddhisme. Cependant, en ce monde, combien sont ceux qui ont des idées semblables?
Certains travaillent dur pour se faire une position sociale supérieure, et certains sont très diligents quand il s'agit de faire des sous. Dans ce genre de situation, est-il possible pour nous d'être assurés de l'existence de la Vérité vraie? Est-il possible pour nous de croire en la seule possibilité de Vérité dans nos sociétés? A dire vrai, il pourrait bien se révéler impossible pour nous de dire que nos sociétés humaines, divisées qu'elles sont entre le matérialisme et l'idéalisme, puissent croire en cela. Mais si nous nous fondons sur le réalisme bouddhiste, nous aurons peut-être la chance d'en atteindre la seule possibilité. Donc, si nous, êtres humains, voulons y croire, et continuons dans notre quête de la vérité, nous devons d'abord fracasser totalement les illusions de l'idéalisme et du matérialisme.

Dans le point suivant de son chapitre, maître Dôgen refuse vigoureusement les attitudes communes chez l'être humain qui sont de suivre la voie facile. Certes, le Bouddhisme n'a rien d'une philosophie ascétique, et en conséquence, nous ne devons en aucun cas rechercher de la souffrance dans cette pratique. Mais en même temps, il est nécessaire de ne pas choisir une manière plus facile seulement en fonction du critère de facilité. La Vérité bouddhique n'est jamais que la seule Vérité, qui transcende le facile et le difficile. Maître Dôgen insiste donc sur l'incongruité de discuter de la difficulté ou de la facilité, lorsque nous nous mettons en quête de la Vérité, car de telles attitudes seraient complètement opposées à la Vérité.

De surcroît, il insiste sur le fait que les considérations, les décisions, les suppositions, les intuitions, les perceptions et même la compréhension n'ont rien à voir avec le fait de saisir la Vérité bouddhique.

Et, du point de vue des philosophies intellectuelles, cette insistance pourraît nous paraître bien ridicule. Mais lorsque nous remarquons que la Vérité bouddhique n'a pas de rapport avec nos capacités intellectuelles, mais seulement avec le fait de savoir si le système nerveux autonome est équilibré, ou pas, nous pouvons comprendre clairement la base fondamentale des enseignements du Bouddha Gautama. Il est donc nécessaire pour nous de reconnaître que le réalisme bouddhique est toujours en rapport avec la condition humaine, que notre système nerveux autonome soit équilibré ou pas, juste au moment présent. Ce fait simple existe depuis que l'homme est l'homme, mais il nous a été nécessaire d'attendre le XIX° ou le XX° siècles pour le reconnaître. Je m'estime donc bien heureux de vivre au XXI° siècle.

Nous devons donc penser qu'il nous est impossible de réaliser la Vérité bouddhique en ne nous fondant que sur les lettres, ou les mots, mais qu'il est nécessaire de pratiquer zazen tous les jours, si nous voulons maintenir notre système nerveux autonome en état d'équilibre. Et, sans ces efforts, nous ne pourrons pas toucher directement la réalité. C'est donc notre devoir, pourrait-on dire, que de le faire. On peut remarquer, dans l'histoire récente, que l'entraînement sportif, les performances musicales ou dramatiques, les expérimentations scientifiques ont pris des proportions considérables, et je pense que cette tendance suggère que notre civilisation est peut-être déjà entrée dans une ère du réalisme. Je pense donc qu'il nous faut détruire ces vieux systèmes philosophiques si puissants, que sont l'idéalisme et le matérialisme, dont l'Ere remarquable est arrivée à son terme.



1  Dachien Huineng (Daikan Eno), le Sixième Patriarche.



Suite du texte du Gakudô Yôjin shu


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Dogen Sangha

 

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