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Je remercie Mr Mitchell qui m'a aimablement autorisé à effectuer une version française de son travail. Pour la prononciation de la translitération Pinyin, reportez-vous à la Table des translitérations du Pinyin au Wade-Giles et au japonais

Arrière-plan de la philosophie chinoise

 

Les chercheurs occidentaux ont fait beaucoup de cas de l'apparente habileté des Chinois à syncrétiser les doctrines traditionnelles du Bouddhisme, réconciliant ainsi des points de vue doctrinaux et des différences qui, en Inde, étaient restées très distinctes dans l'esprit de nombreux enseignants. Mais en fait, le désir d'harmoniser et d'unifier les croyances fondamentales de la doctrine mahayanique a toujours été une constante de la scholastique indienne. La théorie du tathagata-gharba n'est jamais devenue la base d'une école doctrinale spécifique, mais elle a été aisément incorporée dans le système Yogacara, de même que la théorie de l'ainsité ou de la non-dualité. Puis vint la soudaine montée en popularité du Bouddhisme ésotérique ou tantrique, au cours des VI° et VII° siècles -- le troisième dharmachakra ou "Faire tourner la Roue" -- dont l'explication et la codification ont dû requérir une quantité de savants considérable, ce qui a laissé plus ou moins en suspens le développement ultérieur de la scholastique indienne. L'influence du tantrisme a été tellement importante qu'il nous faut regarder vers le Bouddhisme tibétain plutôt que chinois, si nous voulons avoir une idée de ce à quoi ressemblait l'essentiel du Bouddhisme en Inde avant son extinction.

Il ne faudrait pas non plus nous imaginer qu'il se soit inséré paisiblement et sans controverse dans le paysage philosophique autochtone chinois. Loin de là. Les taoïstes, les confucianistes et les bouddhistes s'attaquaient mutuellement en permanence et rivalisaient pour obtenir la faveur impériale pour leur camp, résistant rarement au désir de dénigrer la substance philosophique de l'adversaire au passage. Le Fo zu tung ji du moine Zhiban, une chronique du Bouddhisme entre 581 et 960 écrite selon l'optique Tiantai, rapporte les interminables controverses entre les écoles, et fait dire par exemple au grand traducteur du VII° siècel, Xuanzang: "Il y a de grandes différences entre les enseignements du Bouddha et ceux de Lao-tseu. Il est impossible d'expliquer le sens de Lao-tseu en termes bouddhistes. De plus, le sens fondamental de Lao-tseu manque beaucoup de profondeur." [Jan Yuen-Hua, A Chronicle History of Buddhism in China 581-960 AD: Translations form Monk Chih-p'an's Fo-tsu T'ung-chi, p. 34.]

Mais il existe un élément de la pensée chinoise autochtone qui n'a jamais été bien éloigné de la littérature bouddhiste sous les Tang, et qui a eu une influence exceptionnelle sur les ancêtres Cao-Dong, et c'est le concept cosmogonique corrélatif du yin et du yang. En tant que catégories de l'ordre cosmique sous-tendant tous les phénomènes, le yin et le yang fournissent une base conceptuelle pour percevoir la réalité dans un cadre de référence dualiste. Tous les phénomènes sont causés par l'interaction de deux forces polaires opposées, qui s'interpénètrent dans d'infinies configurations, et rendent compte de notre expérience de la vie comme d'un monde immensément variable de circonstances et de situations changeantes.

L'un des cinq classiques, le Yi-king (Livre des Mutations) est un système de divination basé sur les permutations du yin et du yang, par l'examen des tendances actuelles vers le changement telles que représentées par l'utilisation de combinaisons de six lignes brisées ou continues, qu'on appelle les hexagrammes. Dongshan Liangjie s'y rapporte expressément dans son poème célèbre, le Baojing sanmei ke (Chant du Miroir de Jade du Samadhi -- jap. Hokkyô Zanmai) qui fait partie des textes centraux du Cao-Dong:
Six lignes forment le double trigramme Li ,
Où principe et apparences interagissent.
Lignes entassées en trois paires
Qui se transforment pourtant de cinq façons.

Effectivement, l'enseignement des Cinq Rangs par Dongshan peut aussi se comprendre comme une explication diagrammatique de l'interaction entre le yin et le yang, transposée en contexte bouddhiste.

Shitou Xiqian se réfère aussi de façon répétée au jeu mutuel des forces opposées: principe et phénomènes, lumière et obscurité, devant et derrière, près et loin, sage et laïc, etc.. Toutes ces paires d'opposés peuvent être vues comme dérivées de la notion métaphysique chinoise des deux forces opposées et corrélatives qui sous-tendent la dynamique de la création. C'est de façon expérimentale par la pratique de la méditation, et symbolique par ses enseignements transmis par écrit, que le Bouddhisme Chan tente d'offrir une réconciliation de toutes les antinomies ou opposés, et les instructions des maîtres chan dans tous ces récits thématisent de façon continuelle ce processus de résolution. Posé en tant que problème de logique, les opposés sont résolus par la réalisation de l'ainsité, ou non-dualité. En tant que topos métaphysique, ils ont unis par l'intuition que la vacuité est constituée au moyen de la forme et que la forme elle-même est une expression de cette même vacuité. Une grande partie de la littérature des kôans surgit de l'éveil soudain d'un élève à ces perceptions, et les séculaires enseignements chinois du yin et du yang font office de trame insistante. Il s'agit d'une substruction tacite et consensuelle qui unit le Confucianisme, le Taoïsme et le Bouddhisme, tout comme en Inde l'acceptation de la renaissance, et la pratique du yoga en tant que moyen d'accès à la libération (moksa) caractérisent les différentes traditions hindouïste, jaïniste et bouddhiste.

Rappellons-nous également que les premiers maîtres Cao-Dong étaient très familiers avec la littérature classique chinoise. Ils étaient versés dans les sûtras bouddhistes et leurs commentaires, ils devaient avoir étudié des textes aussi fondamentaux que Sengzhao et l'Eveil de la Foi dans le Mahayana, et avaient certainement réfléchi sérieusement et souvent aux nouvelles idées Huayen qui étaient populaires au début des Tang. Atteindre un tel degré de familiarité avec la théorie bouddhiste devait requérir une bonne connaissance des Cinq Classiques confucéens, dont l'étude servait de curriculum pour l'éducation des jeunes lettrés tout autant que de définition courante de toute forme d'instruction à l'époque Tang. Il semble évident qu'autant Shitou que Dongshan connaissaient leurs classiques taoïstes -- on croit que le poème de Shitou "L'Accord de la Différence et de l'Unité" renvoie au Zhao Lun, un ouvrage taoïste classique. En même temps, ces deux enseignants étaient certainement des hommes éminemment pratiques, qui étaient nettement convaincus de l'importance de la réalisation intuitive comme de la meilleure façon de s'approcher de la vérité bouddhiste, un mode qui ne requiert pas un haut niveau d'instruction ou d'étude philosophique, et qui reste donc accessible à tous.


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