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© Nanabozho (le Grand Lapin)
Mise à jour de cette version française :
11 août 2015

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Versione italianaantenati dello zen soto

Je remercie Mr Mitchell qui m'a aimablement autorisé à effectuer une version française de son travail. Pour la prononciation de la translitération Pinyin, reportez-vous à la Table des translitérations du Pinyin au Wade-Giles et au japonais

Sources des textes

 

Notre connaissance du Chan sous les Tang, à l'exception significative d'un certain nombre de manuscrits trouvés à Dunhuang et qui datent du début du IX° siècle, provient essentiellement des nombreuses histoires des écoles Zen qui apparaissent en séquence à partir du milieu du X° siècle jusque vers 1300, et qui furent donc compilées beaucoup plus tard que les événements qu'elles décrivent. Les biographies et des enseignements transcrits de Shitou, Yaoshan et Yunyen sont ici traduits dans leur intégralité à partir du Wu deng hui yuan (Cinq Lampes fondues dans la Source), compilé par les moines Pu Ji et Hui Ming. Cet ouvrage, d'abord publié en 1253, est le plus complet de toutes les histoires chan traditionnelles; il combine des matériaux trouvés dans cinq recueils antérieurs de "transmission de la lampe" (chuang deng shi) et ajoute aussi des éléments nouveaux. pour en savoir plus sur la vie de Shitou et ses enseignements, nous avons aussi inclus quelques histoires additionnelles du Zu tang ji (Collection de la Salle des Ancêtres), paru en 952, en plus d'autres récits sur Shitou tirés des entretiens de divers disciples à lui, qu'on trouve aussi dans le Wu deng hui yuan, ou dans le Jingde chuan deng lu (Transmission de la Lampe de l'ère Jingde), publié en 1004. Il est clair qu'on peut trouver quelques différences importantes dans les histoires de l'époque Song, non seulement en termes des matériaux inclus, mais aussi du style littéraire et donc probablement aussi du lectorat visé. Il y en a un bon exemple dans la version que donne le Zu tang ji de la jeunesse de Shitou, si on la compare avec celle du Wu deng hui yuan. Le premier, avec son habituel accent mis sur les aspects du folklore bouddhiste, offre un compte-rendu un peu miraculeux de la naissance de Shitou, aspect totalement omis dans le plus savant Wu deng hui yuan.

Comment être sûrs que ce que nous lisons est le véritable enseignement de ces maîtres chan du début des Tang? Evidemment, on ne peut pas. Dans les décennies qui viennent, il est vraisemblable que l'érudition chinoise, par la comparaison textuelle et l'analyse linguistique, pourra bien mieux décider des problèmes d'authenticité historique. En attendant, il serait correct de suggérer que certaines parties des histoires de l'époque Song nous fournissent des représentations raisonnablement fidèles de ce que ces maîtres pensaient et enseignaient, à l'origine. Malgré la constante tentation des éditeurs subséquents de réviser, omettre, interpréter ou interpoler, il doit y avoir eu aussi en oeuvre une tendance conservatrice de faire passer une vérité qui soit aussi près que possible de l'original, même lorsque des problèmes de privilèges d'école ou de lignage étaient en jeu. Il est également utile de se rappeler que, du point de vue de la pratique bouddhiste, il n'est pas très important que les textes soient authentiques ou pas. Il est au contraire plus significatif que des générations de Bouddhistes Zen en Chine, en Corée et au Japon aient, pendant un millier d'années, accepté ces documents comme "évangile" et aient utilisé leurs enseignements en tant que modèles pour leur propre pratique.


Histoire du Chan de 700 à 850

 

La découverte des manuscrits de Dunhuang a révélé une autre source importante d'information sur le mouvement chan à l'époque de Shitou, Yaoshan et Yunyan, sous la forme d'une histoire du Chan écrite par le cinquième patriarche Huayan, Zongmi (780-841), qui nous fournit une vue d'ensemble des différentes écoles existant à son époque. Ecrite de son propre point de vue sectaire --Zongmi était un maître reconnu dans les deux traditions chan Huayan et Hoze -- elle montre qu'il n'y avait pas un unique enseignement ou pratique de méditation qui aurait été commun à toutes les écoles chan, mais que chaque secte avait sa propre orientation doctrinale et ses propres méthodes d'enseignement, et aussi que chacune était située dans une région différente de la Chine. Zongmi en mentionne sept différentes: Niutou, celle du Nord, l'école de Lao An, deux écoles au Szechuan, Hongzhou (école de Nanyue Huaizhang), et Hoze, l'école du Chan du sud de Shenhui, à laquelle Zongmi lui-même appartenait.

L'Ecole Niutou ou école de la Tête de Boeuf, qui a évidemment été bien peu affectée par la controverse qui a divisé les écoles du Nord et du Sud, était située au sud de Nanjing (dans ce qui est aujourd'hui le Jiangsu). Elle se réclamait d'un lignage séparé, remontant à Daoxin, Le Quatrième patriarche, et fut très influencée par les enseignements Tiantai. Elle n'a pas survécu au-delà du IX° siècle. L'Ecole du Nord n'a émergé en tant que tradition séparée qu'après avoir été l'objet de la vigoureuse opposition de Shenhui (670-762), le polémiste de l'Ecole du Sud, et de ses disciples. Elle était centrée sur les anciennes capitales Tang de Changan et Loyang, et prétendait descendre directement du Cinquième Patriarche par son disciple Faju (638-689), qui a vécu pendant 16 ans dans la communauté de Hongren, dans la Montagne Orientale. Faju a reçu de Hongren la transmission du dharma, et nombreux furent ceux qui finirent par le considérer comme le fondateur de l'Ecole du Nord. Cependant, le maître de plus célèbre de cette école fut Shenxiu, mort en 706. Comme Faju, il reçut aussi la transmission du Dharma du Cinquième Patriarche sur le Mont Oriental, et chercha à établir la pratique de la méditation chan basée sur les sûtras mahayaniques, qu'il étudia profondément pendant toute sa longue carrière. Mais l'Ecole du Nord, qui avait tout d'abord été considérée comme étant le lignage chan le plus important au début de l'époque Tang, et qui reçut le soutien de deux empereurs Tang, fut elle aussi condamnée à s'éteindre au début du IX° siècle, probablement à cause de divisions au sein de sa direction dans les années qui suivirent la mort de Shenxiu.

L'Ecole du Sud fut créée grâce aux efforts de Shenhui, un disciple de Huineng, mais qui avait aussi brièvement pratiqué la méditation avec Shenxiu en 699-701. Lors d'une "Grande Assemblée du Dharma" qui eut lieu le 15 janvier 732, dans un temple situé dans un lieu dit Huatai, dans le Hunan, Shenhui annonça que la succession ininterrompue dans la transmission du Dharma, à partir de Bodhidharma, avait été passée de Hongren au Sixième Patriarche, Huineng. En plus d'accuser l'Ecole du Nord d'avoir très littéralement usurpé le patriarcat du Chan, Shenhui l'accusa de plus d'avoir produit un enseignement faux, c'est à dire que l'Eveil se produit par une pratique graduelle, alors que Huineng avait enseigné que l'Eveil se produit "d'un seul coup", comme une avancée soudaine. Le débat souvent acrimonieux entre les Ecoles du Nord et du Sud était connu de tous ceux qui avaient à faire avec le mouvement chan du VIII° siècle et se poursuivi pendant plusieurs décennies, avec des enseignants du Jiangxi et du Hunan qui ne perdaient pas de temps à s'allier avec le zu shi chan, le Chan des Patriarches, ainsi que les disciples de Huineng l'appellèrent plus tard. La popularité croissante du Liu zu tan jing (Le Sûtra de l'Estrade du Sixième Patriarche) occupa un rôle central dans ce mouvement. On le tenait pour un recueil exact des enseignements de Huineng, mais son origine est douteuse, et il pourrait bien avoir été écrit, au moins en partie, bien plus tard par les disciples de Shenhui. Le poème de Shitou Xiqian L'Accord de la Différence et de l'Unité, fournit plusieurs références directes au Sûtra de l'Estrade, probablement en tant que Moyen Habile de démontrer son allégeance (de Shitou) à l'Ecole du Sud.

Pour Zongmi, qui écrit au début du IX° siècle, l'école du Sud était le mieux représentée par l'école Hoze, dont il était lui-même le chef de file reconnu.. L'école Hoze fut fondée par Shenhui, mais ne survécut pas à Zongmi. De façon bien plus significative pour le cours futur des événements, Zongmi parle en quelque détail d'une seconde école du Sud, qu'il appelle l'école de Hongzhou, fondée par les disciples de Mazu au Jiangxi. Comme Zongmi ne fait pas mention de l'existence d'une autre école méridionale dans la succession de Shitou Xiqian, il nous faut aller voir dans les histoires chan de la période Song pour trouver des informations sur l'émergence graduelle du lignage d'enseignement Cao-Dong, et sa contrepartie dans l'établissement de l'école de Linji [Rinzai], qui ont toutes deux remplacé toutes les autres écoles chan vers la fin des Song.

Quelle était la vie quotidienne d'un moine chan aux alentours de l'année 800? Les histoires et les archives impériales de l'époque Song nous fournissent quelques indices. Au Jiangxi et au Hunan, où l'école du Sud ou "chan des patriarches" était pleinement établie, il doit y avoir eu quelques milliers de moines chan sérieux étudiant dans une variété de temples et de monastères situés dans des régions rurales éloignées et dirigés par quelques douzaines de maîtres renommés. Les moines vivaient et travaillaient dans les différents temples et puis repartaient après une période de temps pour recevoir les enseignements d'un autre maître. Ils travaillaient aux champs et dans les forêts qui entouraient les monastères, accomplissaient des devoirs administratifs, culinaires ou domestiques dans le monastère, et se dévouaient autrement à la routine quotidienne de la méditation, des cérémonies et des conférences. L'activité monastique fut codifiée et réglée par Baizhang Huaihai (720-814), un enseignant renommé dans la lignée de Mazu, dont les réformes eurent pour effet de supplanter la stricte observation des règles du Vinaya, une tendance nouvelle qu'on peut remarquer clairement dès les débuts des enseignements rapportés de Yaoshan.

Le monastère chan lui-même était divisé en bâtiments séparés -- une salle du Dharma pour les conférences et peut-être pour abriter les textes des sûtras, une salle du Bouddha pour les cérémonies, et une salle des moines pour la méditation, où mangeaient et dormaient les moines et parfois aussi recevaient des cours. Les édifices étaient souvent construits en ligne, l'un derrière l'autre, à flanc d'une colline ou d'une montagne, l'ensemble de la zone étant entouré d'un haut mur. Il est malheureux que n'esiste aucun document contemporain qui nous en apprenne plus sur la pratique effective de la méditation des moines des Tang. Tout ce que nous savons, c'est que les nombreuses méthodes de méditation décrites dans les écritures Hinayana étaient le sujet de beaucoup d'expérimentations dans de nombreux monastères du début des Tang, et que le terme méditation assise (zuo chan), quoique décrit nulle part en détail, existait au moins dans le vocabulaire chan dès le VIII° siècle, et se trouve mentionné spécifiquement dans le Sutra de l'Estrade de Huineng. Les moines assistaient à des conférences sur la doctrine et la philosophie bouddhistes, tel que nous l'indique par exemple le commentaire de Yaoshan à l'effet que les moines ont des enseignants pour leur enseigner les sûtras et l' Abidharma."

Il ne faudrait pas que nous en concluions que les monastères chan en pleine expansion, devenant de plus en plus organisés et réglés vers le milieu et la fin des Tang, étaient exclusivement peuplés d'étudiants sérieux et de pratiquants dévoués. Beaucoup, sinon la plupart des moines, étaient certainement illettrés, nombre d'entre eux cherchant à échapper à la dureté et au labeur de la vie de paysan, ou à la conscription forcée dans l'armée, à d'éventuelles poursuites judiciaires pour activités criminelles ou simplement au fait d'être sans abri. Dans tous les cas, les monastères devaient héberger une grande variété d'intérêts et de capacités individuelles. C'est peut-être à un aspect plus douteux de la vie monastique que fait référence Shitou lorsqu'il demande à Dadian Baotong, 'Es-tu le genre de moine qui étudie le Bouddhisme sérieusement, ou es-tu du genre qui traîne à longueur de journée?"

Cette période devait connaître une croissance constante de la vie monastique et une expansion rapide de l'intérêt pour la théorie et la pratique du Chan, de plus en plus stabilisé dans et par le lignage de Huineng. Cet "âge d'or du Chan" connut une fin abrupte lors de la persécution du Bouddhisme instaurée par l'empereur Wuzong dans les années 841-846. Il y avait toujours eu en Chine une certaine animosité envers le Bouddhisme, religion étrangère importée d'Inde, pas seulement de la part des Taoïstes, mais particulièrement de la part des savants et des fonctionnaires confucianistes qui dirigeaient les gouvernements impérial et provinciaux, et qui virent sans doute leur influence et le culte confucéen menacés par cette montée soudaine de l'intérêt pour le Bouddhisme, tout autant que par la prospérité inouïe des monastères. Wuzong lui-même était un ardent taoïste, déterminé a chasser le Bouddhisme de Chine. Mais l'idéologie n'était pas le seul facteur déterminant de la "grande persécution": les raisons économiques furent aussi d'importance primordiale. Les monastères bouddhistes avaient accumulé de la richesse sous la forme de latifundia considérables dans les campagnes, et les revenus de ceux-ci étaient exempts de taxes. La population croissante des moines signifiait pour le gouvernement impérial, une diminution correspondante de la productivité agricole: un moine de plus, un fermier de moins ou un soldat de moins pour l'armée impériale, des considérations importantes dans un pays agricole avec un gouvernement national organisé dont les frontières étaient constamment en butte aux attaques de sociétés nomades et hostiles. On ne peut donc s'étonner que les administrateurs du gouvernement des Tang aient voulu contrôler les quantités croissantes de moines professionnels, craignant peut-être le genre de développement qu'on a pu constater plus tard au Tibet, où éventuellement plus de 30% de la population mâle adulte vivaient dans les murs des monastères.

L'année 846 est celle d'une douche froide dans le développement du Bouddhisme en Chine. Un résultat évident fut l'émergence des mouvements Chan et Jingtu (Terre Pure) en tant qu'écoles dominantes du Bouddhisme, alors que virtuellement toutes les autres sectes connurent un déclin rapide. La persécution sous Wuzong a dû étouffer tout espoir contemporain quel qu'il fut de voir établir le Bouddhisme en tant que religion officielle de l'Empire, et renforça l'idée que le Bouddhisme ne pouvait s'épanouir que par la volonté de l'Etat. Comme il arrive si souvent dans l'histoire de la culture au cours des périodes de troubles politiques, de nouvelles formes d'organisation sociale et de pratique religieuse se développèrent rapidement. Pour le mouvement chan, celles-ci eurent pour résultat l'établissement des Cinq Maisons et la création de nouvelles formes de littérature chan au cours de la période Song qui suivit, dont les traductions présentées sur ce site Web peuvent être considérées comme représentatives.


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