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© Nanabozho (le Grand Lapin)

Shurangama Sûtra

Sûtra de la Marche héroïque

Volume IV

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1 Alors Purnamaitreyaniputra se leva de son siège au sein de la grande assemblée, découvrit son épaule droite, posa le genou droit en terre, joignit respectueusement les paumes, et dit au Bouddha : «Le très vertueux et impressionnant Honoré du Monde vient d'exposer, pour le bénéfice des êtres, la vérité originelle de l'Ainsi-Venu avec une éloquence remarquable.

3 «L'Honoré du Monde me distingue souvent comme le meilleur des conférenciers du Dharma. Mais maintenant que j'entends les subtiles et merveilleuses expressions du Dharma que donne l'Ainsi-Venu, je suis comme un sourd qui à une distance de plus de 100 pas tenterait d'entendre un moustique, qu'en fait on ne peut même pas voir, encore moins entendre.

5 «Quoique les claires explications du Bouddha aient réussi à dissiper nos doutes, nous n'avons pas encore sondé le sens ultime qui pourrait nous permettre de nous hisser au dessus de toutes illusions. Ceux qui sont comme Ananda, quoiqu'éveillés, n'ont pas encore mis fin aux écoulements de leurs habitudes.

6 «Ceux d'entre nous présents dans l'assemblé qui ont atteint le stade du sans-écoulements, malgré la fin de nos écoulements, nous nous interrogeons toujours sur le Dharma exposé par l'Ainsi-Venu aujourd'hui.

7 «Honoré du Monde, si tous les organes des sens mondains, les objets des sens, les skandhas, places, et domaines sont le Trésor de l'Ainsi-Venu, pourquoi donc, dans cette pureté fondamentale, les montagnes, les rivières, la grande terre et tous les autres phénomènes conditionnés surgissent-ils soudain, changent-il et s'écoulent-ils cycliquement, prennent-ils fin et recommencent-ils à nouveau ?

7-8 «Qui plus, l'Ainsi-Venu a dit que les natures de base de la terre, de l'eau, du feu et du vent sont parfaitement fusionnées, compénètrent le Domaine du Dharma, et sont tranquilles et éternelles.

8 «Honoré du Monde, si la nature de la terre est compénétrante, comment peut-elle contenir de l'eau ? Si la nature de l'eau est compénétrante, le feu ne devrait pas pouvoir surgir. De plus, comment expliquez-vous que les natures du feu et de l'eau puissent chacune compénétrer l'espace vide sans se déplacer l'une l'autre ? Honoré du Monde, la nature de la terre est solide ; la nature de la vacuité est vide. Comment peuvent-elles toutes deux compénétrer le Domaine du Dharma ? Je ne vois pas à quoi vise cette doctrine.

9-10 «J'espère seulement que l'Ainsi-Venu nous l'expliquera avec compassion afin de dégager les nuages de la confusion qui nous engouffrent tous dans cette grande assemblée». Ayant dit cela, il se prosterna complètement et respectueusement et attendit avec espoir l'insurpassable enseignement compatissant de l'Ainsi-Venu.

10-11 L'Honoré du Monde dit alors à Purna et à tous les Arhats de l'assemblée qui avaient mis fin à leurs écoulements et avaient atteint le niveau au-delà de l'étude : «Aujourd'hui, l'Ainsi-Venu va vous explique en profondeur le sens le plus vrai et le plus suprême. Que ceux d'entre vous qui sont des auditeurs ou des Arhats de nature fixe, n'ayant pas encore réalisé les deux sortes de vacuité et tous ceux qui sont dédiés au Véhicule supérieur atteignent la tranquillité du Véhicule unique, le véritable aranya, l'emplacement approprié pour la culture. Ecoutez avec attention et je vous l'expliquerai». Purna et les autres écoutèrent en silence, respectant l'explication du Dharma donnée par le Bouddha.

13 Le Bouddha dit : «Purna, tu as demandé pourquoi dans la pureté fondamentale, les montagnes, les rivières et la grande terre surgissent soudainement.

14 «N'as-tu pas souvent entendu l'Ainsi-Venu disserter sur la lumière merveilleuse de la nature éveillée et la claire merveille de l'Eveil fondamental ?»

Purna dit : «Oui, Honoré du Monde, j'ai souvent entendu le Bouddha exposer sur ce sujet».

15 Le Bouddha dit : «Tu parles de comprendre l'Eveil ; est-ce que la Nature comprend, et est-ce ça qu'on appelle l'Eveil ? Ou est-ce que l'Eveil manque dès le départ de compréhension de sorte que tu parles de comprendre l'Eveil ?»

Purna répondit : «Si un défaut de compréhension s'appelle l'Eveil, alors, il n'y aurait pas de compréhension du tout».

16 Le Bouddha dit : «S'il n'y avait pas de compréhension du tout, alors il ne pourrait y avoir aucune compréhension de l'Eveil. Si la compréhension est ajoutée, alors ce n'est pas l'Eveil. Si on n'ajoute pas la compréhension, alors il n'y a pas de compréhension. Mais un défaut de compréhension ou ignorance n'est pas la claire et lucide nature de l'Eveil.

17 «La nature de l'Eveil inclut certainement la compréhension. Il est redondant de parler de l'Eveil comprenant.

«L'Eveil n'est pas une sorte de compréhension. La compréhension crée un domaine objectif. une fois ce domaine objectif créé, ton état subjectif faux surgit.

19 «Là où il n'y a eu ni identité, ni différence, soudain la différence apparaît. ce qui diffère de cette différence devient identité. Une fois que la identité et la différence se suscitent mutuellement, et à cause d'elles, ce qui n'est ni identité ni différence est créé.

20 «Ce tumulte amène à terme la fatigue. Une fatigue prolongée produit l'impureté. Leur combinaison en une obscure turbidité crée des afflictions en rapport avec les impuretés épuisantes.

21 «Le monde passe par ce surgissement ; le manque de surgissement dévient la vacuité. La vacuité est identité ; le monde est différence. Ceux qui n'ont ni différence ni identité deviennent les dharmas conditionnés.

22 «La compréhension ajoutée à l'Eveil crée une lumière qui se tient en opposition mutuelle avec l'obscurité de la vacuité. Le résultat en est que les roues de vent qui supportent le monde viennent à être

23 «La tension entre la vacuité et cette lumière crée le mouvement. La lumière fausse et persistante congèle en une solidité qui devient du métal. Un manque d'Eveil nourrit cette persistance et fait que les roues de métal fixent toutes les terres.

24 «Cet état tenace sans éveil, crée le métal, pendant que les fluctuations de la lumière font se lever le vent. La friction entre le vent et le métal crée le feu, qui est variable par nature.

«Le métal produit l'humidité qui cause que la flamme sorte du feu. Ainsi apparaît la roue de l'eau qui comprend tous les domaines dans les dix directions.

25 «Le feu se lève et l'eau retombe, et leur combinaison devient tenace. Ce qui est mouillé devient les océans et les mers ; ce qui est sec devient les continents et les îles.

«A cause de ça, le feu se lève souvent dans les océans, et sur les continents, les ruisseaux et les rivières coulent toujours.

26 «Quand la puissance de l'eau est moindre que celle du feu, il en résulte les hautes montagnes. C'est pour ça que les rochers des montagnes rendent des étincelles lorsqu'on les frappe et deviennent liquides lorsqu'on les fond.

«Quand la puissance de la terre est moindre que celle de l'eau, il en résulte l'herbe et les arbres. C'est pourquoi la végétation en bosquets et en marais finit en cendres lorsqu'on la brûle et qu'il en sort de l'eau lorsqu'on la presse.

27 «L'interaction de cette fausse dichotomie en retour crée ces éléments en tant que semences et de ces causes et conditions provient la continuité du monde.

«Qui plus est, Purna, la fausse compréhension n'est rien d'autre que l'erreur d'ajouter la compréhension à l'Eveil.

28 «Après que la fausseté du domaine de l'objectivité ait été établie, la compréhension subjective ne peut la transcender. En conséquence, l'ouïe ne va pas au-delà du son et la vue ne surpasse pas la forme.

«Les formes, les odeurs, les goûts, les objets du toucher et les autres des six faussetés sont réalisées. A cause d'elles, il y a une division en vue, sensation, ouïe, et connaissance.

29 «Un même karma lie les êtres ensemble ; l'union et la séparation apportent leurs transformations.

29-30 «La manifestation de la lumière est causée par la vue fausse et l'ignorance. Les conceptions compétitives génèrent la haine ; les conceptions compatibles créent l'amour. Le flux de l'amour devient une semence ; le foetus potentiel est pris et la conception a lieu. Lorsqu'a lieu le coït, les êtres avec un karma similaire sont attirés. De ces causes et conditions, le kalaka, l'arbuda, et les autres stades foetaux évoluent.

36 «Le né d'une matrice, le né d'un oeuf, le né de l'humidité, le né de la transformation viennent en réaction : l'être né d'un oeuf vient de la pensée, le né d'une matrice est dû à l'émotion, celui né de l'humidité surgit de l'union, et les transformations découlent de la séparation.

37 «L'émotion, la pensée, l'union, et la séparation passent par d'autres changements, et la maturation de tels karmas font qu'on s'élève ou qu'on coule. De telles causes et conditions vient la continuité des êtres.

38 «Purna, la pensée et l'amour se lient l'une à l'autre de sorte que les gens s'aiment les uns les autres et ne supportent pas la séparation. En résultat, les naissances incessantes et successives de parents, enfants et petits-enfants ont lieu en ce monde. Et à la base de tout cela sont le désir et l'avidité.

38-39 «L'avidité et l'amour émotionnel se nourrissent mutuellement jusqu'à ce que l'avidité devienne insatiable. Avec pour résultat dans ce monde, la tendance des nés d'un oeuf, d'une matrice, de l'humidité, et de la transformation à s'entre-dévorer autant que leur force le leur permet. La base de tout cela est la tuerie et l'avidité.

40 «Suppose qu'une personne mange un mouton. Le mouton meurt et devient une personne ; la personne meurt et devient un mouton. La même chose s'applique à toutes les renaissances au sein des dix catégories. A travers mort après mort et naissance après naissance, elles se mangent mutuellement. Le mauvais karma avec lequel on est né continuera jusqu'aux limites du futur. A la base de tout cela, il y a le vol et l'avidité.

42 «Tu me dois la vie». «Je dois rembourser la dette que j'ai envers toi». A cause de telles causes et conditions, nous traversons des centaines de milliers d'éons dans le cycle continu de la naissance et de la mort.

43 «Tu aimes mon esprit; j'adore ton allure». A cause de telles causes et conditions, nous traversons des centaines de milliers d'éons dans un emmêlement mutuel et continu.

44 «Tuer, voler et forniquer sont les racines de base. De telles causes et conditions provient la continuité du karma et de la rétribution.

44-45 «Purna, ces trois sortes de continuités inverties proviennent du fait d'ajouter la compréhension à l'Eveil. le manque de compréhension génère une conscience interne qui donne lieu aux phénomènes externes. Tous deux naissent de conceptions fausses. De cette fausseté les montagnes, les rivières, la grande terre et tous les phénomènes conditionnés se déploient en succession récurrente à travers les cycles infinis».

49 Purna dit : «Si ce merveilleux éveil, cette merveilleuse conscience de l'éveil fondamental, qui n'est ni plus grand ni moindre que l'esprit de l'Ainsi-Venu, apporte abruptement les montagnes, les rivières et la grande terre, ainsi que tous les phénomènes conditionnés, alors maintenant que l'Ainsi-Venu a atteint la merveilleuse vacuité du clair éveil, est-ce que les montagnes, es rivières et la grande terre, ainsi que tous les écoulements conditionnés habituels vont jamais surgir à nouveau?»

51 Le Bouddha dit à Purna :«Si une personne vivant dans un village devait être embrouillée sur les directions, confondant le sud et le nord, est-ce que cette confusion serait le résultat de la confusion ou de la conscience?»

Purna répondit : «Sa confusion ne serait le résultat d'aucune. Pourquoi donc? La confusion est fondamentalement sans fondement, aussi que pourrait-il surgir à cause d'elle ? Et comme la conscience ne provoque pas de confusion, comment la confusion pourrait-elle en résulter ?»

52 Le Bouddha dit : «Si quelqu'un qui connaît les directions les désigne à la personne embrouillée, alors, une fois que cette personne qui s'est embrouillée devient consciente, supposes-tu, Purna, qu'elle perdrait à nouveau son sens de l'orientation à nouveau dans ce village ?»

«Non, Honoré du Monde».

54 «Purna, les Ainsi-Venus des dix directions sont pareils. La confusion est sans fondement et finalement vide en sa nature. Par le passé, il n'y avait fondamentalement aucune confusion. On aurait simplement dit qu'il y avait de la confusion et de l'éveil. Lorsque l'illusion et l'éveil prennent fin, l'éveil ne donne plus naissance à la confusion.

55-56 «Considère la personne qui, à cause de cataractes, a vu des fleurs dans l'espace. Une fois les cataractes enlevées, les fleurs de l'espace disparaissent. S'il devait se précipiter à l'endroit où disparaissent les fleurs et attendait qu'elles réapparaissent, considérerais-tu que cette personne serait sage ou folle ?»

56 Purna répondit : «A l'origine, il n'y avait aucune fleur dans l'espace. C'était à cause d'une incapacité visuelle qu'elles apparaissaient et disparaissaient. De voir la disparition des fleurs dans l'espace est déjà en soi une distortion. Attendre qu'elles réapparaissent est de la pure folie. Pourquoi se faire caguer à déterminer plus avant si une telle personne est stupide ou sage ?»

57 Le Bouddha dit : «Si tu l'expliques comme ça, pourquoi demandes-tu si la claire vacuité du merveilleux éveil peut encore une fois donner naissance aux montagnes, aux rivières et à la grande terre ?

59 «Considère un morceau de minerai qui contient de l'or et d'autres métaux mélangés ensemble. Une fois l'or pur extrait, il ne redeviendra jamais du minerai. Considère le bois qui a brûlé et s'est réduit en cendres ; il ne redeviendra jamais bois.

«La Bodhi et le Nirvana de tous les Bouddhas, les Ainsi-Venus, sont pareils.

60 «Purna, tu as aussi demandé si les natures de l'eau et du feu ne se détruiraient pas mutuellement si les natures de la terre, de l'eau, du feu et du vent étaient toutes parfaitement fusionnées et compénétraient le Domaine du Dharma, et si l'espace et la grande terre ne seraient pas incompatibles s'ils compénétraient tous deux le Domaine du Dharma.

61 «Purna, considère l'espace : sa substance n'est pas les divers phénomènes, et pourtant elle n'empêche pas tous les phénomènes d'y être incluse.

62 «Comment le savons-nous? Purna, l'espace vide est clair les jours de soleil, et sombre lorsque le ciel est nuageux. Il se déplace lorsque se lève le vent, il est frais lorsque se dégage le ciel. Il est trouble et brumeux, lorsqu'il fait mauvais, il est obscur lorsqu'éclate une tempête. Il projette une brillante réflexion sur un étang d'eau claire.

62-63 «Penses-tu que ces phénomènes conditionnés viennent à exister à différents endroits ? Sont-ils créés à partir de ces conditions elles-mêmes ou leur origine est-elle dans l'espace? S'ils surgissent de ces conditions, Purna, alors lorsqu'il fait beau soleil, comme le soleil brille, tous les mondes dans les dix directions devraient prendre la forme du soleil. alors, pourquoi donc est-ce que, les jours de beau soleil, que nous voyons le soleil rond dans le ciel ? Si l'espace est brillant, il devrait briller, lui-même. Donc pourquoi, lorsque le ciel se couvre de nuages et de brouillard, n'y a-t-il aucune lumière qui se voie ?

63-64 «Il faut que tu saches que la clarté n'est pas le soleil, ni l'espace, ni autre chose que l'espace ou le soleil.

64 (Hors propos --- voir le commentaire.) «Il en va de même avec la vraiment merveilleuse clarté éveillée. Tu reconnais l'espace, et l'espace apparaît. Reconnais la terre, l'eau, le feu et le vent et chacun apparaîtra. Si on les reconnaît tous, tous apparaissent.

65 «Comment peuvent-ils apparaître tous ? Purna, considère le reflet du soleil lorsqu'il apparaît dans un simple plan d'eau. Deux personnes le regardent, toutes deux au même moment. Puis, une de ces personnes s'en va vers l'est et l'autre vers l'ouest. Chacune, tout en continuant à regarder l'eau verra un soleil l'accompagner, l'une vers l'est et l'autre vers l'ouest, cependant qu'il ne semble pas y avoir de direction précise pour le mouvement du reflet du soleil.

65-66 «Ne t'acharnes pas sur la question en demandant : «S'il n'y a qu'un soleil, comment peut-il suivre les deux personnes ? Ou s'il est double, pourquoi n'y en apparaît-il qu'un seul dans le ciel ?» ce n'est là que se complaire dans la fausseté, parce que de telles choses ne peuvent être prouvées.

66 (Hors propos --- voir le commentaire.) «Observe la manière dont les phénomènes sont en fin de compte faux et ne peuvent être vérifiés. Ils sont comme des fleurs conjurées dans l'espace qui ne pourront porter fruit. Pourquoi alors chercher comment de tels phénomènes apparaissent et disparaissent ?

67 (Hors propos --- voir le commentaire.) «Observe comment la nature est en fin de compte vérité et n'est rien d'autre que la merveilleuse clarté éveillée. Cet esprit clair merveilleusement éveillé n'était à l'origine ni eau ni feu. Pourquoi alors, s'interroger sur l'incompatibilité?

67-68 «Purna, tu crois que la forme et la vacuité se surmontent et se détruisent l'une l'autre dans le Trésor de l'Ainsi-Venu. Ainsi le Trésor de l'Ainsi-Venu t'apparaît en tant que forme et vacuité à travers tout le Domaine du Dharma.

68 «C'est ainsi qu'en lui le vent se meut, la vacuité est immobile, le soleil brille et les nuages sont sombres. La raison de tout ceci tient dans l'illusion des êtres qui ont tourné le dos à l'Eveil et qui se sont joints aux poussières impures. C'est ainsi que les souillures épuisantes viennent à être et qu'existent les phénomènes mondains.

69 «En me fondant sur la compréhension merveilleuse qui ne cesse ni ne vient à être, je m'unis avec le Trésor de l'Ainsi-Venu. C'est ainsi que le Trésor de l'Ainsi-Venu est l'unique et merveilleuse clarté éveillée qui illumine complètement le Domaine du Dharma.

70 «C'est ainsi qu'en lui l'un est sans limites ; le sans limites est un. Dans le petit apparaît le grand ; dans le grand apparaît le petit.

70-71 «Immuable dans le Bodhimanda, et pourtant compénétrant dans les dix directions, mon corps contient les dix directions et la vacuité sans fin. A l'extrémité d'un simple cheveu, apparaissent les terres des Rois de Jade. Assis sur un grain de poussière, je fais tourner la grande roue du Dharma, je mets fin à la poussière impure et je m'unis avec l'éveil, de sorte que la véritable ainsité, la merveilleuse claire nature éveillée, vienne à être.

73 «Le Trésor de l'Ainsi-Venu est l'esprit fondamental, merveilleux, parfait.

«Ce n'est ni l'esprit, ni la vacuité, ni la terre, ni l'eau, ni le vent, ni le feu ; ce ne sont ni les yeux, ni les oreilles, ni la langue, ni le corps, ni l'esprit. Ce n'est ni la forme, ni les sons, les odeurs, les goûts, les objets du toucher ni les dharmas. Ce n'est ni le domaine de la conscience oculaire, ni aucun autre, jusqu'à et y-compris le domaine de la conscience mentale.

74 «Ce n'est ni la compréhension, ni l'ignorance, ni la fin de la compréhension ou de l'ignorance, ni rien d'autre, jusqu'à et y-compris la vieillesse et la mort et la cessation de la vieillesse et de la mort.

77 «Ce n'est ni la souffrance, ni l'accumulation, ni l'extinction, ni la Voie.

Ce ne sont ni la connaissance ni l'obtention.

83 «Ce ne sont ni le Dana, ni le Shila, ni le Virya, ni la Kshanti, ni le Dhyâna, ni le Prajña, ni le Paramita,

85 «ni aucun autre : ce ne sont ni le Tathagata, ni les Arhats, ni la Samyaksambodhi, ni le Pari nirvâna, ni l'Eternité, ni la Béatitude, ni le Vrai Soi, ni la Pureté.

86 «Ce n'est, en conséquence, ni mondain ni transcendantal, vu que le Trésor de l'Ainsi-Venu est la merveille de la compréhension primitive de l'esprit.

87 «C'est l'esprit ; c'est la vacuité ; c'est la terre ; c'est l'eau ; c'est le vent ; c'est le feu ; c'est les yeux, les oreilles, le nez, la langue, le corps et l'esprit. C'est la forme ; c'est le son, les odeurs, les goûts, les objets du toucher et les dharmas. C'est le domaine de la conscience oculaire et ainsi de suite, jusqu'à et y-compris le domaine de la conscience mentale.

88 «C'est la compréhension et l'ignorance et la fin de la compréhension et de l'ignorance, et ainsi de suite, jusqu'à et y-compris la vieillesse et la mort et la fin de la vieillesse et de la mort. C'est la souffrance ; c'est l'accumulation ; c'est l'extinction ; c'est la Voie. C'est la connaissance et l'obtention. C'est le Dana, le Shila, le Virya, la Kshanti, le Dhyâna, le Prajña et c'est le Paramita, et ainsi de suite, jusqu'à et y-compris le Tathagata, les Arhats, la Samyaksambodhi, le Parinirvâna, l'Eternité, la Béatitude, le Vrai Soi et la Pureté.

89 «C'est aussi mondain que transcendantal, vu que le Trésor de l'Ainsi-Venu est la merveilleuse compréhension de l'esprit primal.

90 «C'est séparé de l'identité et de la négation. C'est l'identité et la négation.

«Comment les êtres des trois domaines de l'existence mondaine et les Auditeurs et Ceux au niveau de l'existence transcendantale, peuvent-ils faire des suppositions au sujet de la Bodhi insurpassée de l'Ainsi-Venu avec les mentaux qu'ils connaissent, ou entrer dans la connaissance et la vision du Bouddha par le moyen du langage mondain ?

91 «Considère les luths, les flûtes, et les guitares. Même si ces instruments peuvent produire des sons merveilleux, s'il n'y a pas de doigts habiles pour en jouer, leur musique n'en sortira jamais.

92 «Il en va de même pour toi et pour les autres êtres. Le précieux esprit vrai éveillé est parfait en tous. J'applique une pression et l'Impression Océan émet de la lumière ; tu bouges ton esprit et les souillures épuisantes surgissent.

93 «Tout ceci se produit parce que tu ne cherches pas avec diligence la Voie éveillée sans pareille, mais que tu aimes bien le moindre véhicule et que tu te satisfais d'un petit accomplissement.».

96-97 Purna dit : «Mon esprit et le vrai merveilleux esprit pur de l'Ainsi-Venu ne sont pas différents dans leur éveil précieux et parfait et leur compréhension complète. Mais il y a longtemps que je suis affligé de pensées fausses sans commencement et que j'endure le cycle des renaissances. Pour le moment, mon accomplissement du sage véhicule n'est pas total. L'Honoré du Monde a complètement mis fin à toute fausseté et atteint la merveilleuse vérité éternelle.

97-98 «Je m'aventure jusqu'à demander à l'Ainsi-Venu la raison pour laquelle tous les êtres êtres existent dans la fausseté et dissimulent leur propre merveilleuse compréhension, de sorte qu'ils continuent à se noyer dans ce déluge?»

98 Le Bouddha dit à Purna : «Quoique tu aies rejeté tes doutes, tu n'as pas encore mis fin aux illusions résiduelles. Je vais maintenant te questionner sur un événement mondain.

99 «As-tu entendu parler de Yajnadatta de Çravasti qui, sous une impulsion, prit un miroir un matin, le porta a son visage, et tomba en amour avec la tête dans le miroir ? Il a regardé les yeux et les sourcils, mais s'est fâché parce qu'il ne pouvait pas voir tout le visage. Il décida qu'il devait être un génie de rivière ou de montagne, perdit le contrôle de lui-même et parti en courant. qu'en penses-tu ? Pourquoi cette personne est-elle devenue folle sans aucune raison ?»

Purna répondit : «Cette personne était insane. Il n'y a pas d'autre raison».

101 Le Bouddha dit : «Quelle raison peux-tu donner pour dire que la merveilleuse et claire perfection éveillée, la merveille fondamentalement claire et parfaite, est fausse ? S'il y a une raison, alors comment définis-tu le faux ?

102 «Tout ton propre faux raisonnement devient à son tour cause de plus de faux raisonnements. A partir de la confusion tu accumules de la confusion éon après éon ; quoique le Bouddha en soit conscient, il ne peut s'y opposer.

104 «A partir de causes aussi confuses, la cause de la confusion se perpétue elle-même. Lorsqu'on réalise que la confusion n'a pas de cause, la fausseté devient infondée. Comme elle n'a jamais commencé, pourquoi voudrais-tu espérer qu'elle prenne fin ? Celui qui obtient la Bodhi est comme une personne qui s'éveille pour raconter les événements d'un rêve ; comme son esprit reste éveillé et clair, pourquoi voudrait-elle s'accrocher aux choses du rêve ?

105 «Ceci est particulièrement vrai des choses à qui il manque une cause et qui sont fondamentalement inexistantes, comme la situation de Yajnadatta ce jour-là dans la ville. Y eut-il une quelconque raison pour qu'il se soit mis à avoir peur à sa tête et qu'il soit parti en courant ? Si sa démence avait subitement cessé, il ne pourrait tout de même pas récupérer sa tête d'un endroit extérieur à lui-même ; et c'est ainsi qu'avant même que ne cesse sa démence, comment sa tête aurait-elle pu être perdue ?

106 «Purna, il en est de même de la fausseté. Comment peut-elle exister ?

107 «Tu n'as qu'à ne pas suivre les distinctions sur les trois sortes de continuité du monde, des êtres, et des rétributions karmiques. En coupant à toutes ces trois conditions, les causes ne surgiront pas.

107-08 «Alors la démence, comme celle de Yajnadatta prendra fin d'elle-même. Une fois qu'elle prend fin, la Bodhi apparaît. L'esprit suprême, pur et clair compénètre originellement tout le domaine du Dharma. ce n'est pas quelque chose qu'on obtient de quelqu'un d'autre. Pourquoi donc, alors, peiner à cultiver en se fatiguant jusqu'aux os en tentant d'obtenir une certification ?

109 «Considère le cas d'une personne qui aurait, cousue dans ses vêtements, une perle qui exauce les voeux, mais ne le saurait pas. Miséreux et en haillons, elle errerait partout en mendiant sa nourriture et ne s'arrêtant jamais. Quoiqu'effectivement misérable, elle n'a jamais perdu la perle.

111 «Soudain, une personne sage lui montre la perle : alors, tous ses voeux peuvent se réaliser, elle obtient une grande richesse et réalise que la perle n'est pas venue de quelqu'un d'autre».

112 Alors, sortant de la grande assemblée, Ananda s'inclina devant les pieds du Bouddha, se releva et dit au Bouddha : «L'Honoré du Monde vient juste d'expliquer le karma du meurtre, du vol et de la luxure : lorsque ces trois conditions sont tranchées, les trois causes ne surgissent pas. Alors, la démence, comme celle de Yajnadatta cessera d'elle même, et une fois qu'elle prend fin, apparaît la Bodhi. Il ne s'agit pas de quelque chose qu'on obtient de quelqu'un d'autre. Il s'agit là clairement de causes et de conditions ; pourquoi donc l'Ainsi-Venu rejette-t-il abruptement les causes et les conditions?

113 «Mon éveil est venu des causes et des conditions. Honoré du Monde, ceci n'est pas seulement vrai de ceux d'entre nous qui sont jeunes en années ou qui sont des auditeurs encore en cours d'apprentissage. Mahamaudgalyayana, Çariputra, et Subhuti, et d'autres qui suivent les Brahmanes anciens, ont été éveillés et ont obtenu le sans écoulements en entendant le Bouddha exposer sur les causes et les conditions.

114 «Maintenant, vous dites que la Bodhi ne vient pas des causes et des conditions. Ceci ferait que la spontanéité que Maskari Goshaliputra et d'autres ont prêché à Rajagriha serait le sens premier ! J'espère seulement que le Très Bon dissipera ma confusion».

115 Le Bouddha répondit à Ananda: «Prenons le cas de Yajnadatta en ville : si les causes et les conditions de sa démence cessent, la nature qui n'est pas démente en sortira spontanément. L'entier principe de la spontanéité et des causes et conditions n'est rien de plus que cela.

116 «Ananda, la tête de Yajnadatta était là naturellement ; elle était une partie naturelle de lui. Il n'y a jamais eu un moment où elle ne l'était pas. Pourquoi, alors, a-t-il soudainement pris peur de n'avoir plus de tête et est-il parti en courant comme un fou?

116-17 «S'il avait naturellement une tête, et qu'il est devenu fou en vertu des causes et des conditions, ne serait-il pas tout aussi naturel pour lui de perdre sa tête en vertu des causes et des conditions?

117-18 «Fondamentalement, sa tête n'a jamais été perdue. La démence et la peur ont surgi de la fausseté. aucun changement n'a jamais eu lieu. Pourquoi donc insister sur les causes et les conditions?

118 «Si la démence avait été son état naturel, la démence et la peur seraient fondamentales. Avant qu'il ne devienne fou, où donc était cachée sa démence?

«Si la démence n'avait pas été son état naturel, et que sa tête n'était en fait pas perdue, pourquoi est-il parti en courant dans cet état de démence?

«Si tu te rends compte que tu as une tête, et que tu reconnais la démence de ta poursuite, alors autant la spontanéité que les causes et les conditions deviennent des théories oiseuses. C'est pourquoi je dis qu'une fois que les trois conditions cessent d'être, l'esprit de la Bodhi apparaît.

119 «Le surgissement de l'esprit de la Bodhi et la fin de l'esprit sujet à la naissance et à la cessation impliquent eux-mêmes la naissance et la cessation.

119-20 «La fin autant de la naissance que de la cessation est la Voie sans effort. S'il y a spontanéité, alors il est clair que la pensée de la spontanéité doit naître et que l'esprit sujet à la naissance et à la cessation doit prendre fin : mais cela reste le cas de la naissance et de la cessation.

120 «Appeler spontanéité le manque de naissance et de cessation, ce serait comme de dire qu'une combinaison de phénomènes mondains qui forment une seule substance sont mélangés et unis dans la nature, et que tout ce qui n'est ni mélangé ni uni est spontané de nature.

121 «La spontanéité n'est pas naturelle, et le mélange et l'unification manquent de qualités unifiante. La spontanéité et l'unité toutes ensemble doivent être abandonnées, et autant leur abandon et leur existence cessent d'être. Y arriver ne serait pas une théorie oiseuse.

122 «La Bodhi et le Nirvana sont encore si lointains que tu dois sans le moindre doute passer des éons d'amertume et de diligence avant de pouvoir les cultiver et être certifié.

122 «Tu peux mémoriser les douze divisions des Sûtras prononcés par les Bouddhas des dix directions et leur purs, merveilleux principes aussi nombreux que les sables du Gange, mais ceci ne t'aide qu'à faire des théories oiseuses.

123 «Quoique tu puisses discuter des causes et des conditions et de la spontanéité et les comprendre parfaitement clairement, et que les gens se réfèrent à toi comme étant celui qui est le plus érudit, pourtant les éons après éons que tu as passé à te saturer de connaissances ne t'ont pas aidé à éviter des embrouilles avec la fille de Matangi.

125 «Pourquoi fallait-il que tu m'attendes pour utiliser le mantra de la Couronne du Bouddha afin d'éteindre le feu de la luxure dans le coeur de la fille de Matangi, ce qui lui aurait permis d'atteindre la position d'Anagamin et de se joindre à un groupe vigoureux dans mon assemblée du Dharma, asséchant ainsi le torrent de l'amour émotionnel en elle et te libérant?

128 «En conséquence, Ananda, ta capacité à maîtriser le merveilleux enseignement secret de l'Ainsi-Venu pendant des éons et des éons n'est pas aussi bonne qu'un seul jour de culture du sans écoulements qui cherche à quitter les deux souffrances mondaines de l'amour et de la haine.

129-30 «Chez la fille de Matangi, une ancienne prostituée, l'amour émotionnel et le désir ont été dissipés par le pouvoir spirituel du mantra. Maintenant son nom dans le Dharma est la Bhikshuni Nature.

130-31 «Elle et la mère de Rahula, Yashodhara, les deux ont pris conscience de leur causes passées et on su que pendant de nombreux éons, elles ont enduré les souffrances de l'avidité et de l'amour émotionnel. Etant donné leur détermination, elles se sont imprégnées de la culture de la bonté sans-écoulements, elles ont été toutes deux libérées de leurs liens et ont reçu des prédictions. Pourquoi donc te leurres-tu et restes-tu encore pris dans le regard et l'écoute?»

132 Lorsqu'Ananda et la grande assemblée entendirent l'enseignement du Bouddha, leurs doutes et leurs illusions furent dissipés. Leurs esprits s'éveillèrent à la réalité ultime, ils firent l'expérience de l'aisance lumineuse autant physique que mentale, et de réalisations sans précédent.

133 Une fois encore Ananda pleura, se prosterna aux pieds du Bouddha, s'agenouilla, joignit les paumes et dit au Bouddha : «Le Grand, Pur et Précieux Roi Compatissant Sans Egal m'a bien instruit, de sorte qu'au moyen de ces diverses causes et conditions, expédients et encouragements, tous ceux d'entre nous qui étaient immergés dans l'océan de la souffrance y ont échappé.

135 «Honoré du Monde, ayant entendu cette explication du Dharma, je sais que le Trésor de l'Ainsi-Venu, le merveilleux esprit clair, compénètre les dix directions et contient les terres des Ainsi-Venus à travers les dix directions, tous les kshetras purs et élégamment ornés des Merveilleux Rois Eveillés. L'Ainsi-Venu m'a également averti que l'érudition n'a pas de mérite et n'est pas aussi bonne que la culture.

136 «De la sorte, me voici comme un vagabond qui rencontre soudain un roi divin qui lui accorde une maison élégante. Même s'il a obtenu une maison, il lui faut passer par une porte.

136-37 «J'espère seulement que l'Ainsi-Venu ne retiendra pas sa grande compassion pour instruire ceux de nous dans l'assemblée qui sont couverts par l'obscurité, de sorte que nous puissions renoncer au Petit Véhicule et obtenir enfin le Nirvana de l'Ainsi-Venu sans résidu, la voie fondamentale de la résolution. Puisse-t-il permettre à ceux qui apprennent encore de savoir comment dompter l'habitude séculaire de chercher à manipuler les conditions à son avantage, pour obtenir une Dharani, et pour entrer dans la connaissance et la and vision des Bouddhas». Ayant dit, il effectua une prosternation complète, et ensemble avec les membres de l'assemblée, ils attendirent obstinément l'enseignement compatissant du Bouddha.

139 L'Honoré du Monde sympathisa alors avec les Auditeurs et les Eveillés aux Conditions de l'assemblée, tous ceux qui n'étaient pas encore à l'aise avec l'esprit de la Bodhi. Sa sympathie s'étendit aussi à aider les êtres dans le futur âge terminal du Dharma, après l'entrée du Bouddha dans la tranquillité pour qu'ils fassent surgir la résolution d'atteindre la Bodhi. Il révéla la merveilleuse voie de la culture du Véhicule insurpassable.

140 Il proclama pour Ananda et pour la grande assemblée : «Tu as résolument décidé d'obtenir la Bodhi et tu ne devrais donc pas te lasser quand tu en viens au Merveilleux Samadhi des Bouddhas, les Ainsi-Venus. Il faut que tu comprennes d'abord deux absolus qui concernent la résolution initiale pour l'Eveil. Quels sont ces deux absolus qui concernent la résolution initiale pour l'Eveil.

142 «Ananda, le premier absolu, c'est que si tu souhaites renoncer à la position d'Auditeur et cultiver le véhicule du Bodhisattva, et pénétrer la connaissance et la vision des Bouddhas, il te faut soigneusement considérer si la résolution sur la base des causes, et l'éveil sur la base de la réalisation sont la même chose ou s'ils sont différents.

142 «Ananda, il est impossible, sur la base causale, de fonder la culture sur l'esprit, qui est sujet à naissance et cessation lorsqu'il est en quête du véhicule du Bouddha qui ne surgit ni ne cesse d'être.

143 «Pour cette raison tu dois te rendre compte que tous les dharmas composés qui appartiennent au monde matériel se décomposeront et disparaîtront. Ananda, contemple le monde : quels sont les dharmas composés qui ne s'épuiseront pas ?

143 «Cependant, je n'ai jamais entendu dire de l'espace vide qu'il s'épuise. Quelqu'un a-t-il déjà entendu parler de désintégration du vide ? Pourquoi cela ? L'espace vide n'est pas un composé et ne pourra jamais s'épuiser.

144 «Tant que tu es dans ton corps, ce qui est solide est de la terre, ce qui est humide vient de l'eau, la chaleur vient du feu et ce qui est mobile est du vent. A cause de ces quatre liens, ton esprit tranquille et parfait, merveilleusement clair et éveillé se divise entre la vue, l'ouïe, la sensation et la cognition. De son début jusqu'à sa fin, tu est plongé dans les cinq couches de la turbidité.

142 «Ananda, il est impossible, sur la base causale, de fonder la culture sur l'esprit, qui est sujet à naissance et cessation lorsqu'il est en quête du véhicule du Bouddha qui ne surgit ni ne cesse d'être.

143 «Pour cette raison tu dois te rendre compte que tous les dharmas composés qui appartiennent au monde matériel se décomposeront et disparaîtront. Ananda, contemple le monde : quels sont les dharmas composés qui ne s'épuiseront pas ?

143 «Cependant, je n'ai jamais entendu dire de l'espace vide qu'il s'épuise. Quelqu'un a-t-il déjà entendu parler de désintégration du vide ? Pourquoi cela ? L'espace vide n'est pas un composé et ne pourra jamais s'épuiser.

144 «Tant que tu es dans ton corps, ce qui est solide est de la terre, ce qui est humide vient de l'eau, la chaleur vient du feu et ce qui est mobile est du vent. A cause de ces quatre liens, ton esprit tranquille et parfait, merveilleusement clair et éveillé se divise entre la vue, l'ouïe, la sensation et la cognition. De son début jusqu'à sa fin, tu est plongé dans les cinq couches de la turbidité.

145 «Qu'entend-on par turbidité ? Ananda, l'eau pure, par exemple, est fondamentalement claire et propre, alors que la poussière, la terre, les cendres, la vase et ainsi de suite sont fondamentalement des substances solides. Telles sont les propriétés de ces deux : leurs natures ne sont pas compatibles. Suppose que quelqu'un prenne de la terre et la jette dans l'eau pure. La terre perd sa solidité et l'eau est privée de sa transparence. L'assombrissement qui en résulte s'appelle turbidité. Tes cinq couches de turbidité y sont similaires.

147 «Ananda, tu vois que l'espace compénètre les dix directions. Il n'y a pas de division entre l'espace et la vue. Et pourtant, l'espace en lui-même ne peut identifier sa propre substance, et la vue seule n'a rien à enregistrer dont elle ait conscience. Mais les deux s'emmêlent dans la fausseté. C'est là la première couche, appelée la turbidité du temps.

148 «Ton corps apparaît en plein, avec les quatre éléments qui composent sa substance et de là, la vue, l'ouïe, la sensation et la cognition deviennent fermement définies. L'eau, le feu, le vent et la terre fluctuent entre la sensation et la cognition et s'emmêlent dans la fausseté. C'est là la seconde couche, appelée la turbidité des vues.

148-49 «De plus, les fonctions de la mémoire, de la discrimination, et de la compréhension verbale dans ton esprit amènent la connaissance et les vues à l'existence. Du dehors d'elles apparaissent les six objets de souillure. Si ce n'était des objets de souillure, la conscience manquerait d'attributs. Si ce n'était de la cognition, les objets n'auraient pas de nature. Cependant ils s'emmêlent dans la fausseté. C'est là la troisième couche, appelée la turbidité des afflictions.

150-51 «Et, jour et nuit, il y a un surgissement et une cessation incessants, cependant que ta connaissance et tes vues souhaitent continuellement demeurer dans le monde, alors que tes schémas karmiques te déplacent continuellement en divers endroits. Cet emmêlement devient une fausseté, qui est la quatrième couche, appelée turbidité des êtres vivants.

151 «Originellement, ta vue et ton ouïe n'étaient pas de natures différentes, mais une multitude d'objets de souillure les a séparées en différences grossières. Ces natures ont une conscience mutuelle, mais leurs fonctions sont en opposition. L'identité et la différence surgissent et elles perdent leur identité. Cet emmêlement devient une fausseté, ce qui est la cinquième couche, appelée turbidité de la durée de vie.

152 «Ananda, tu veux maintenant faire que ta vue, ton ouïe, tes sensations et ta cognition retournent correspondre à l'éternité, le bonheur, le vrai Soi et la pureté de l'Ainsi-Venu.

153 «Tu dois d'abord décider de ce qu'est la base de la naissance et de la mort en te basant sur la nature tranquille et parfaite qui ne surgit ni ne cesse.

«Au moyen de cette tranquillité, influence le surgissement et la cessation vides et faux de sorte qu'ils soient soumis et retournent à la source de l'Eveil. Atteindre cette source de clair éveil qui ne surgit ni ne cesse, est l'esprit de la base causale.

154 «Alors tu pourras complètement réaliser la culture et la certification jusqu'à la base de la fruition. En faire tant est comme purifier l'eau boueuse en la plaçant dans un récipient immobile qui ne bouge absolument pas. Le sable et la boue se déposent et l'eau pure apparaît. c'est ce qu'on appelle la soumission initiale des afflictions souillantes transitoires.

156 «L'élimination complète de la boue de l'eau est appelée la séparation éternelle de l'ignorance fondamentale.

«Quand la clarté est pure jusqu'en son essence, alors peu importe ce qui se produit, il n'a aucune affliction. Tout est en accord avec les vertus pures et merveilleuses du Nirvâna.

157 «Le second absolu est que si tu désires absolument éprouver la résolution pour la bodhi, et être particulièrement courageux et engagé dans ta culture du Véhicule du Bodhisattva, tu dois renoncer à tous les phénomènes conditionnés.

158 «Tu dois soigneusement considérer les origines des afflictions : qui est-ce qui crée et qui est-ce qui endure la création sans début du karma et des renaissances perpétuelles ?

159 «Ananda, si, dans ta culture de la Bodhi tu ne considères pas soigneusement l'origine de l'affliction, tu ne pourras comprendre où se trouve l'emplacement de l'inversion des organes des sens et des objets des sens faux et vides. Si tu ne connais même pas leur emplacement, comment peux-tu les soumettre et atteindre le niveau de l'Ainsi-Venu?

160 «Ananda, considère le cas de celui qui veut dénouer un noeud. S'il ne peut voir où se trouve le noeud, comment peut-il le défaire ?

«Mais je n'ai jamais entendu parler de quiconque qui aurait dénoué l'espace vide. Et pourquoi donc ? Parce que la vacuité n'a pas de forme d'apparence ; et qu'il n'y a de la sorte pas de noeuds à défaire.

161 «Mais pour l'instant, tes yeux, oreilles, nez, et langue, de même que ton esprit et ton corps visibles, sont comme six marieurs voleurs qui pillent les joyaux de ta propre maison.

164 «Et c'est ainsi que depuis les temps sans commencement, parce que les êtres et le monde spatio-temporel sont liés ensemble, les êtres sont incapables de transcender le monde matériel.

165 «Ananda, comment définissons-nous les êtres et le monde spatio-temporel ?

'Temporel' renvoie au changement et au flux ; 'spatial' envoie à l'emplacement.

166 «Tu dois savoir maintenant, que le nord, l'est, le sud, l'ouest, le nord-est, le nord-ouest, le sud-est et le sud-ouest, sont de l'espace, au-dessus et en-dessous. Le passé, le présent et le futur sont des périodes de temps. Il y a dix directions dans l'espace et trois périodes de temps.

«Tous les êtres viennent à l'existence à cause des fausses interactions. Leurs corps passent par des changements et sont pris dans les combinaisons spatio-temporelles de ce monde.

167 «Cependant, quoiqu'il y ait dix directions dans l'espace, celles qui sont connues dans le monde comme le nord, le sud, l'est et l'ouest sont les seules qui peuvent être clairement fixées. Au-dessous et en-dessus n'ont pas de position ; les intermédiaires n'ont pas de direction définie. Clairement déterminées comme étant quatre en nombre, elles sont alors combinées avec les trois périodes de temps. Trois fois quatre, ou alternativement, quatre fois trois font douze.

«Augmente cela au troisième degré ; des dizaines aux centaines jusqu'aux milliers. La plus grande efficacité possible de chacun des six organes est des mille deux-cents.

168 «Donc, Ananda, tu peux ainsi établir leur valeur. Considère comment les yeux voient l'obscurité derrière et la lumière devant. L'avant est totalement lumière ; l'arrière est totalement sombre. Y-compris de ta vision périphérique, tu ne peux voir au mieux que les deux tiers de ce qui t'entoure. Ta capacité peut donc être exprimée comme une efficacité incomplète. Un tiers de cette efficacité est sans vertu. Sache donc que les yeux n'ont qu'une efficacité de huit cents.

169 «Considère comment les oreilles entendent partout dans les dix directions, sans la moindre perte. Elles entendent les mouvements, éloignés ou proches, et le silence sans limites. Sache donc que l'organe de l'ouïe est complète avec une efficacité de douze cents.

169-170 «Considère comment le nez sent les odeurs à chaque inhalation et chaque exhalation du souffle. Il est déficient au point qui se trouve entre l'inhalation et l'exhalation. L'organe de l'odorat peut être considéré être déficient d'un tiers. sache donc que le nez n'a une efficacité que de huit cents.

170 «Considère comment la langue peut proclamer l'entièreté de la sagesse mondaine et transcendantale. Quoique que le langage change selon les localités, ses principes transcendent toutes frontières. Sache donc que l'organe de la langue est complet avec une efficacité de douze cents.

171 «Considère comment le corps est sensible au toucher, comment il enregistre chaque sensation en tant que douleur ou plaisir. Lorsqu'il entre en contact, il est sensible à la chose touchée ; lorsqu'il est en isolation, il n'a pas de connaissance tactile des autres choses. L'aspect de l'isolation est simple et celui du contact est double. L'organe du corps peut être considéré comme déficient par un tiers. Sache donc que le corps n'a une efficacité que de huit cents.

172 «Considère comment l'esprit inclut silencieusement tous les dharmas mondains et transcendantaux dans les dix directions et les trois périodes de temps. Sans égards à ce qu'il soit ou sage ou ordinaire, tout est inclus dans son immensité sans limites. Sache donc que l'organe de l'esprit est complet et que son efficacité est de douze cents.

«Ananda, tu veux maintenant t'opposer au flux des désirs qui conduit à la naissance et à la mort. Il te faut retourner le flux des organes afin d'atteindre l'état de ni naissance ni cessation.

173 «Il te faut explorer tous les six organes fonctionnels afin de voir lesquels s'unissent, lesquels sont isolés, lesquels sont profonds et lesquels sont sans profondeur, lesquels pénètrent parfaitement et lesquels sont imparfaits.

«Si tu peux te rendre compte desquels organes pénètrent parfaitement, tu pourras donc renverser le flux de leur implication sans commencement dans le faux karma et le suivre jusqu'à parfaite pénétration. La différence entre cela et un organe qui n'est pas parfait est comme la différence entre un jour et un éon.

174 «Je t'ai maintenant révélé l'efficacité fondamentale de la tranquille clarté parfaite de ces six. C'est ce que sont les nombres. Il en tient à toi de choisir dans lesquels entrer. Je t'en dirai plus pour t'aider à y progresser.

175 «Les Ainsi-Venus des dix directions, en cultivant grâce à l'un ou l'autre des dix-huit domaines, ont atteint la Bodhi parfaite insurpassée. Pour eux; n'importe lequel de ces dix-huit était généralement adéquat.

«Mais tu es à un niveau inférieur et n'es pas encore capable de perfectionner une sagesse confortable parmi eux. Je te donnerai donc une explication afin que tu puisses pénétrer profondément dans la porte.

176 «Franchis-en une sans fausseté et tes six organes sensoriels seront simultanément purs».

Ananda dit au Bouddha : «Honoré du Monde, comment nous opposons-nous au flux, entrons-nous profondément par une porte et amenons-nous les six organes à se purifier simultanément ?»

177 Le Bouddha dit à Ananda : «Tu as déjà obtenu le fruit de Çrotâpana. Tu as déjà mis un terme aux illusions conceptuelles qui affligent les êtres vivants des trois domaines, mais tu ne sais pas encore que tes organes ont accumulé des habitudes qui sont sans commencement. On ne peut se séparer de ces habitudes sans la culture. Y-compris les nombreuses subtilités de leur surgissement, de leur permanence, de leurs changements et de leur cessation.

178 «Il faudrait maintenant que tu observes davantage les six organes : sont-ils un ou six ? Ananda, si tu dis qu'ils n'en forment qu'un seul, pourquoi les oreilles ne peuvent-elles voir ? Pourquoi la tête ne peut-elle marcher  ? Pourquoi les pieds ne peuvent-ils parler ?

180 «Si les six organes sont absolument six, alors, au moment où je vous expose cette subtile et merveilleuse porte dharmique au sein de cette assemblée, lequel de vos six organes la reçoit ?» Ananda dit : «Je l'entends de mes oreilles». Le Bouddha dit : «Tes oreilles l'entendent d'elles-mêmes ? Qu'est-ce donc que cela a à voir avec ton corps et ta bouche ? Et c'est pourtant de ta bouche que t'enquiers des principes et de ton corps que tu montres ta vénération.

181 «Tu dois donc savoir que s'ils ne sont pas un seul, alors ils sont six. Et que s'ils ne sont pas six, ils doivent être un. Mais tu ne peux pas dire que tes organes soient fondamentalement un et six.

181-182 «Ananda, tu dois savoir que ces organes ne sont ni un ni six. C'est parce qu'elle marche sur la tête et qu'elle sombre dans les implications sans commencement depuis des temps sans commencement que la théorie du un et six a été établie. En tant que Çrotâpanna, tu as dissous les six, mais tu ne t'es pas encore défait de l'une.

183 «C'est comme remplir des récipients de diverses formes avec la vacuité et dire ensuite que la vacuité a toute forme qu'aurait le récipient. Et puis ensuite, lorsqu'on se débarrasse des récipients, considérer la vacuité et dire que c'est tout pareil.

184 «Comment la vacuité peut -elle être pareille ou différente à ta convenance?

Tu peux encore moins l'appeler «Une» ou «Non-une». Tu dois comprendre que les six organes réceptifs fonctionnels sont semblables.

186 «La vue se produit parce que les deux attributs de l'obscurité et de la lumière et leur pareils adhèrent fermement à la quiétude dans ce qui était à l'origine la merveilleuse perfection. L'essence de la vue reflète la forme et se combine avec les formes pour devenir un organe. Cet organe, qui était à l'origine les quatre purs éléments, est appelé un oeil et a la forme d'un raisin. Des quatre objets de souillure que poursuivent les organes des sens qui sont situés dans la tête, celui-ci poursuit la forme.

188 «L'ouïe se produit parce que les deux réverbérations du mouvement et de l'immobilité et leurs pareils adhèrent fermement à la quiétude dans ce qui était à l'origine la merveilleuse perfection. L'essence de l'ouïe reflète le son et résonne avec lui pour devenir l'organe de l'oreille. La composition primaire de l'organe-oreille, ce sont les quatre éléments purement définis. Ces parties que nous appelons les oreilles ont la forme de feuilles fraîchement roulées. Des quatre objets de souillure que poursuivent les organes des sens, celui-ci est lâché sur le son.

189 «L'odorat se produit parce que les deux apparences de la pénétration et de l'obstruction et leurs pareils adhèrent fermement à la tranquillité dans ce qui était à l'origine la merveilleuse perfection. L'essence de l'odorat reflète les senteurs et les absorbe pour devenir l'organe du nez. La composition primaire de l'organe-nez, ce sont les quatre éléments purement définis. Cette portion que nous appelons le nez a la forme d'une pince double pendante. Des quatre objets de souillure que poursuivent les organes des sens, celui-ci court après les senteurs.

190 «Le goût se produit parce que les deux mélanges de la fadeur et de la variété de saveurs et leurs pareils adhèrent fermement à la quiétude dans ce qui était à l'origine la merveilleuse perfection. L'essence du goût reflète les saveurs et s'entremêle avec elles pour devenir l'organe de la langue. La composition fondamentale de l'organe-langue est dans les quatre éléments purement définis. Cette portion que nous appelons la langue a la forme d'un croissant de lune. Des quatre objets de souillure que poursuivent les organes des sens, celui-ci a soif de saveurs.

191 «La sensation se produit parce que les deux frictions de la séparation et de l'union et leurs pareils adhèrent fermement à la quiétude dans ce qui était à l'origine la merveilleuse perfection. L'essence de la sensation reflète le contact s'en saisit pour devenir l'organe du corps. La composition fondamentale de l'organe-corps est dans les quatre éléments purement définis. La portion que nous appelons le corps a la forme d'une table. Des quatre objets de souillure que poursuivent les organes des sens, celui-ci est amené par le contact.

191-192 «La connaissance se produit parce que les deux continuités de la production et de l'extinction et leurs pareils adhèrent fermement à la quiétude dans ce qui était à l'origine la merveilleuse perfection. L'essence de la connaissance reflète les dharmas et les saisit pour devenir l'organe de l'esprit. La composition fondamentale de l'organe-mental est dans les quatre éléments purement définis. La portion que nous appelons le corps a la forme d'une table. Des quatre objets de souillure que poursuivent les organes des sens, celui-ci est à la recherche des dharmas.

192 «Ananda, parce qu'on ajoute la compréhension à l'Eveil, les six organes des sens perdent leur essence et adhèrent à la fausseté, ce qui restreint leur brillance.

193 «En conséquence, à part de l'obscurité et de la lumière, il n'y a pas pour toi de substance à la vue, maintenant; à part du mouvement et de l'immobilité, il n'existe fondamentalement aucune disposition pour l'ouïe; sans la pénétration et l'obstruction, la nature de l'odorat ne surgit pas; en l'absence de la variété et de la fadeur, le goût n'a pas lieu; à défaut de séparation et d'union, la sensation du contact est fondamentalement non-existante; sans naissance et cessation, la connaissance est mise au repos.

194-195 «Tu n'as qu'à ne pas suivre les douze attributs conditionnés du mouvement et de l'immobilité, de l'union et de la séparation, de la fadeur et de la variété, de la pénétration et de l'obstruction, de la production et de l'extinction, et de la clarté et de l'obscurité.

195 «A cet effet, extrais un organe, libère-le de l'adhésion et soumets-le à son noyau interne. Une fois soumis, il reviendra à sa vérité primitive et irradiera sa brillance innée. Lorsque brille cette brillance, les cinq adhésions qui restent seront libres d'accomplir la libération totale.

196 «Ne suis pas la connaissance et de la vue influencées par les objets devant toi. la véritable compréhension ne procède pas des organes des sens. Et pourtant, logé dans ces organes, il y a le potentiel pour découvrir le fonctionnement mutuel des six organes.

198 «Ananda, ne sais-tu pas que maintenant dans cette assemblée, Aniruddha est aveugle et pourtant il peut voir; le dragon Upananda est sourd et pourtant, il peut entendre; l'esprit du Gange n'a pas de nez et pourtant il sent les parfums; Gavampati a une langue inhabituelle et pourtant il goûte les saveurs; et l'esprit de Çunyata n'a pas de corps et pourtant il est conscient du contact ? A la lumière de l'Ainsi-Venu, cet esprit est temporairement illuminé en tant qu'essence éthérée sans substance. De la même manière, Mahakaçyapa, qui se trouve aussi dans cette assemblée, demeure dans le samadhi de l'extinction, ayant obtenu la tranquillité d'un Auditeur. Il y a longtemps qu'il a mis l'organe-mental au repos, et il a pourtant une connaissance parfaitement claire qui ne doit rien au processus mental de la pensée.

202 «Ananda, si tu peux complètement extraire tous tes organes, tu luiras d'une brillance intérieure. Alors, les objets de souillure éphémères et tous les phénomènes changeants du monde matériel deviendront que de la glace que fond un liquide chaud. En réponse à ton esprit, la transformation apportera un éveil sans pareil.

203 «Ananda, considère quelqu'un qui a limité sa vue à ses yeux. Si tu lui fais soudain fermer les yeux, elle verra l'obscurité devant elle. Les six organes seront enveloppés d'obscurité totale. De la tête aux pieds elle en fera l'expérience. Si la personne trace la forme des choses extérieures avec ses mains, alors, même si elle ne peut pas voir, elle pourra reconnaître quelqu'un de la tête aux pieds. L'Eveil est aussi comme ça.

204 «Si la lumière était la condition requise pour la vue, alors l'obscurité amènerait l'absence de la vue. Mais percevoir sans lumière signifierait qu'aucune manifestation de l'obscurité n'obscurcirait la vue.

206 «Une fois que les organes et les objets s'évanouissent brusquement, comment la clarté illuminée qui en résulte pourrait-elle être autre que parfaite et merveilleuse ?»

Ananda dit au Bouddha : «Honoré du Monde, ainsi que l'a dit le Bouddha: «La résolution à s'éveiller sur la base des causes qui cherchent l'éternité, doit être en accord mutuel avec les bases de la fruition.

207 «Honoré du Monde, la base de la fruition est la Bodhi; le Nirvana; la véritable Ainsité; la Nature de Bouddha; La Conscience-Amala; le Trésor vide de l'Ainsi-Venu; Le grand Miroir parfait de Sagesse. Mais bien qu'on l'appelle de ces sept noms, elle est pure et parfaite, sa substance es aussi durable que le vajra royal, éternel et indestructible.

208 «Si la vue, l'ouïe et le reste sont en fin de compte dépourvus de substance à part de la lumière et de l'obscurité, du mouvement et de l'immobilité, et la pénétration et l'obstruction et le reste, alors elles seraient comme des pensées qui, à part des objets immédiats des sens, n'existent absolument pas.

«Comment un nihilisme ultime comme celui-ci pourrait-il être une cause qu'on cultiverait dans l'espoir d'obtenir la septuple fruition éternelle de l'Ainsi-Venus?

209 «Honoré du Monde, si la vue est en fin de compte vide à part de la lumière et de l'obscurité, de même que les pensées cessent d'elles-mêmes en l'absence de tout objet immédiat des sens.

«Alors mes comparaisons tournent en rond et peu importe le soin que je mettrai à ma recherche, il semble n'y avoir rien de tel que mon esprit ou ce qui lui appartient. Que faudrait-il donc utiliser pour rechercher l'Eveil sans Pareil?

210 «L'Ainsi-Venu a fait référence, auparavant, à la tranquille essence, parfaite et éternelle. Sa présente contradiction défie la croyance et s'apparente à une théorisation oiseuse. Comment les paroles de l'Ainsi-Venu peuvent-elles être vraies et actuelles?

«J'espère seulement que le Bouddha laissera retomber sur nous sa grande compassion et qu'il nous instruira à nous qui ne comprenons pas et qui nous agrippons fermement à lui.

211 Le Bouddha dit à Ananda: «Tu étudies et tu apprends beaucoup, mais tu n'as pas encore mis fin à tes écoulements. Dans ton esprit, tu ne connais que les causes qui te mettent à l'envers. Mais lorsque la véritable inversion se manifeste, tu ne peux vraiment pas encore la reconnaître.

«Tant que ta sincérité et ta foi resteront insuffisantes, je tenterai d'utiliser un événement ordinaire pour disperser tes doutes».

212 Alors, l'Ainsi-Venu donna à Rahula instruction de frapper une fois la cloche, et il demanda à Ananda: «As-tu entendu ça?»

Ananda et les membres de la grande assemblée déclarèrent tous: «Nous l'avons entendu».

213 La cloche cessa de résonner et le Bouddha demanda encore: «L'entendez-vous toujours?»

Ananda et les membres de la grande assemblée déclarèrent tous: «Nous ne l'entendons pas».

Rahula frappa alors la cloche à nouveau. Le Bouddha demanda encore: «L'entendez-vous toujours?»

Ananda et les membres de la grande assemblée dirent à nouveau: «Nous l'entendons».

214 Le Bouddha demanda à Ananda: «Qu'est-ce que c'est que tu entends, et que tu n'entends pas?»

Ananda et les membres de la grande assemblée dirent tous au Bouddha: «Quand on sonne la cloche, nous l'entendons. Une fois que le son de la cloche cesse, de telle sorte que même son écho s'éteint, nous ne l'entendons pas».

215 L'Ainsi-Venu donna à nouveau à Rahula instruction de sonner la cloche, et demanda à Ananda: «Y a-t-il un son, maintenant?»

Ananda et les membres de la grande assemblée déclarèrent tous: «Il y a un son».

Après un court délai, le son cessa, et le Bouddha redemanda: «Y a-t-il un son, maintenant?»

Ananda et les membres de la grande assemblée répondirent: «Il n'y a pas de son».

Après un moment, Rahula refit sonner la cloche, et le Bouddha demanda à nouveau: «Y a-t-il un son, maintenant?» Ananda et la grande assemblée dirent ensemble: «Il y a un son».

216 Le Bouddha demanda à Ananda: «Que veut-on dire par «son» et que signifie «Pas de son»?» Tout le monde dans la grande assemblée, y-compris Ananda répondit au Bouddha: «Quand la cloche est frappée, il y a un son. Une fois que cesse le son et que même l'écho en disparaît, on dit qu'il n'y a pas de son».

Le Bouddha dit à Ananda et à la grande assemblée: «Pourquoi êtes-vous inconsistants dans ce que vous dites?»

La grande assemblée et Ananda demandèrent alors au Bouddha: «De quelle manière nous sommes-nous montrés inconsistants?»

217 Le Bouddha dit : «Lorsque j'ai demandé si c'était votre ouïe, vous avez répondu que c'était votre ouïe. Ensuite, je vous ai demandé si c'était le son, vous avez répondu que c'était le son. Je ne puis déterminer à partir de vos réponses s'il s'agit de l'ouïe ou du son. Comment donc ne pas parler d'inconsistance ?

«Ananda, lorsque le son a disparu sans écho, tu dis qu'il n'y a plus d'ouïe. S'il n'y avait réellement plus d'ouïe, la nature-auditive cesserait d'être. Elle ne serait plus que comme du bois mort. Si alors, on sonnait à nouveau la cloche, comment le sauriez-vous ?

218 «Ce que vous savez être ou ne pas être là est l'objet impur du son qui semble venir à l'existence et cesser d'être. Mais comment la nature auditive pourrait-elle être et ne pas être là ? Et si l'ouïe n'était vraiment pas là, comme tu le prétends, qui saurait qu'elle n'est pas là ?

219 «Ainsi, Ananda, les sons que tu entends sont ce qui surgit et cesse. ta nature auditive ne vient pas à l'existence et ne cesse pas d'être en fonction de la survenue ou de la cessation des sons que tu entends.

«Vous êtes tellement cul par dessus tête que vous confondez le son pour l'ouïe. Pas étonnant que vous soyez tellement emmêlés que vous preniez ce qui est éternel pour être de le nihilisme. En fin de compte, vous ne pouvez pas dire qu'il n'y a pas de nature auditive à part du mouvement et de l'immobilité, de l'obstruction et de la pénétration et ainsi de suite.

220-221 «Prends une personne qui tombe dans un profond sommeil alors qu'elle fait la sieste sur son lit. Pendant qu'elle dort, quelqu'un de sa maisonnée se met à battre des vêtements, ou à piler du riz. Dans son rêve, la personne entend le son de ce battage et pilonnage et le prend pour quelque chose d'autre, peut-être le battement d'un tambour ou le tintement d'une cloche. Dans son rêve, elle se demande pourquoi la cloche sonne comme de la pierre ou du bois.

224 «Soudain, elle s'éveille et reconnaît immédiatement le son du pilonnage. Elle dit aux membres de sa maisonnée : «Je viens de faire un rêve où j'ai pris le son du pilonnage pour celui d'un tambour». Soudain elle s'éveille et reconnaît immédiatement le son des coups de pilon. Elle dit aux membres de sa maisonnée : «Je viens tout juste de faire un rêve dans lequel j'ai pris le son des coups de pilon pour celui d'un tambour».

225 «Ananda, comment cette personne peut-elle, dans l'état de rêve, se rappeler l'immobilité et le mouvement, la pénétrabilité et l'obstruction? Même si elle est physiquement endormie, sa nature auditive n'est pas obscurcie.

226 «Même lorsque vos existences physiques s'évanouissent et que votre force de vie change et se racornit, comment cette nature pourrait-elle s'évanouir et ne plus être en vous ?

«Mais comme les êtres, depuis des temps immémoriaux, poursuivent les formes et les sons, et suivent les détours et le flux de leurs pensées ils ne sont toujours pas éveillés à la merveilleuse pure nature.

227 «Ils ne s'accordent pas avec ce qui est éternel, mais partent en chasse de ce qui est sujet à la naissance et à la cessation. C'est ce qui est cause de leurs naissances répétées, parmi les détours et le flux de leur impureté.

229 «Mais s'ils rejettent la naissance et la cessation et maintiennent la vérité éternelle, une lumière durable apparaîtra, et avec cela, les organes des sens, les objets de souillure et les consciences disparaîtront.

«Vous devrez alors garder vos distances avec les souillures des manifestations de la pensée et les états émotionnels de conscience. Alors votre oeil de Dharma deviendra pur et lumineux en conséquence. Et comment pourrez-vous manquer à réaliser l'Eveil Insurpassable?»

231 Ananda dit au Bouddha: «Honoré du Monde, quoique l'Ainsi-Venu ait expliqué ce second absolu, si je considère maintenant quelqu'un qui voudrait défaire un noeud, s'il ne peut en trouver le centre, il ne défera jamais ce noeud.

232 «Honoré du Monde, moi-même et tous les autres Auditeurs dans la grande assemblée qui ne sommes pas au-delà de l'étude, nous sommes dans le même cas. Depuis des temps immémoriaux, nous avons été accompagnés dans la naissance et dans la mort par l'ignorance. Nous avons obtenu ces bonnes racines d'érudition et on dit de nous que nous avons quitté la vie de famille, et pourtant, en fait, nous agissons comme quelqu'un qui a une malaria chronique.

234 «J'espère seulement, ô Très Compatissant, que vous auriez pitié de nous qui coulons et nous noyons. Quels sont les noeuds dans notre corps et notre esprit et comment pourrons-nous les dénouer? Votre explication permettra aussi aux êtres du futur qui seront dans la souffrance et la difficulté d'éviter le cycle des renaissances et de les empêcher de tomber dans les trois domaines de l'existence».

Quand il eut dit cela, lui et tous les membres de la grande assemblée firent des prosternations complètes. Il pleura abondamment, et d'une sincère anticipation, attendit l'enseignement insurpassable du Bouddha, l'Ainsi-Venu.

236 Alors l'Honoré du Monde eut pitié d'Ananda et de ceux dans l'assemblée à qui il restait quelque chose à étudier ainsi que de ces êtres à venir qui auraient le potentiel de transcender le monde et de développer l'intuition.

237 Il caressa le sommet du crâne d'Ananda de sa main qui brillait d'une lumière Jambunada pourpre et or. Instantanément, toutes les Terres de Bouddha dans les dix directions tremblèrent de six façons.

238 Des Ainsi-Venus aussi nombreux que des grains de poussière, chacun demeurant dans son monde respectif, émirent une précieuse lumière du sommet de leurs crânes.

239 Au même moment précis, leur lumière partit de leurs propres pays et allèrent dans le bosquet de Jeta pour couronner la tête de l'Ainsi-Venu. Tous les membres de l'assemblée en reçurent un bénéfice sans précédent.

241 Alors Ananda et tous les membres de la grande assemblée entendirent les Ainsi-Venus aussi nombreux que de fins grains de poussière dans toutes les dix directions parler à Ananda avec différentes bouches mais d'une seule voix.

«Très bien, Ananda, en effet! Tu souhaites reconnaître ton ignorance innée qui te fait tourner sur la roue. L'origine du noeud de la naissance et de la mort se trouve tout simplement dans tes six organes sensoriels et nulle part ailleurs.

243 «Tu désires aussi comprendre l'insurpassable Bodhi, afin de pouvoir rapidement réaliser le bonheur, la libération, la tranquillité et la permanence merveilleuse. Cela aussi, ce sont tes six organes sensoriels et rien d'autre».

246 Quoiqu'Ananda ait entendu ces sons du Dharma, il ne les comprit pas encore. Inclinant la tête, il dit au Bouddha: «Comment se peut-il que ce qui me fait tourner sur le cycle des naissances et des morts et ce qui me permet d'obtenir le bonheur, et la merveilleuse éternité soient les six organes des sens dans les deux cas et rien d'autre?»

247 Le Bouddha dit à Ananda: «Les organes des sens et les objets sont la même source. Les liens et leur détachement ne sont pas des choses différentes. La nature de la conscience est vide et fausse, comme des fleurs dans l'espace.

248 «Ananda, la conscience surgit à cause de objets de souillure. Les phénomènes existent à cause des organes des sens. Les phénomènes et la perception sont tous dépourvus de leur propres natures. Ils se supportent l'un l'autre comme des roseaux entrelacés.

«Créer de la connaissance à l'intérieur de la perception éveillée n'est donc que de l'ignorance fondamentale. Etre dépourvu de perception à l'intérieur de la perception éclairée est la véritable pureté sans écoulements du Nirvana. Pourquoi tenter d'y mettre autre chose?»

248-249 Alors l'Honoré du Monde, souhaitant en réexposer le sens, déclama ce gâthâ, disant:

250 «Dans la vraie nature, les choses conditionnées sont vides.
Les conditions qui surgissent sont comme des illusions.
Les choses non-conditionnées ni ne naissent ni ne cessent.
Irréelles elles sont, comme des fleurs dans l'espace.

«Parler du faux c'est révéler le vrai.
Mais le faux comme le vrai sont eux-mêmes faux.
Comme il n'y a ni vrai ni non-vrai,
Comment pourrait-il y avoir ni percepteur ni perçu?

251 «Entre les deux il n'y a pas de nature réelle;
Ainsi se ressemblent-ils comme des roseaux entremêlés.
Les noeuds et leur dénouement ont une cause commune.
La voie des sages et des gens ordinaires n'est pas deux.

252 «Considère la nature de l'entrelacé:

253 Ils ne sont ni vide ni existant.
La sombre confusion n'est qu'ignorance;
L'amener à la lumière est libération.

255 «Les noeuds doivent être défaits en succession,
Lorsque les six sont libérés,
Même l'un cesse d'être.
Choisissez un organe préféré pour une pénétration parfaite;
Entrez dans le courant et réalisez un véritable éveil.

258 «Extrêmement subtile, la conscience Adana,
Crée des schémas d'habitudes qui s'écoulent en torrents.
Craignant que vous ne confondiez la vérité avec ce qui ne l'est pas,
Je vous parle rarement de tout cela.

259 «Avec votre propre esprit, vous saisissez votre propre esprit;
Ce qui n'est pas illusoire tourne à l'illusion.
De saisissez pas et rien ne sera illusion.
Comme même la non-illusion ne surgit pas,
Comment des dharmas illusoires peuvent-ils être établis?
Ceci s'appelle la Merveilleuse Fleur de Lotus,
Le Royal Joyau de Diamant de l'Eveil.

261 «Dans ce Samapatti qu'on assimile à l'illusion,
Transcendez jusqu'au niveau au-delà de l'apprentissage.

261 «Cet Abhidharma, incomparable,
Est la seule voie qui passe par les portes du Nirvâna,
Qu'empruntent les Bhagavans dans toutes les dix directions».

 

264 Lorsqu'Ananda et la grande assemblée eurent entendu l'enseignement insurpassé et compatissant du Bouddha, l'Ainsi-Venu, ces vers Geya harmonieux et brillants avec leurs merveilleux principes clairs et pénétrants, leurs coeurs et leurs yeux s'ouvrirent, et ils s'exclamèrent que ce Dharma était inouï.


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